Montréal pour Enfants vol. 19 n°1 La relâche 2019 | Page 17
vont être abordées. Et parfois, Sofia arrive avec des
discussions qui se passent dans la cour d’école et,
là, j’ai l’impression que c’est beaucoup plus cru.
Sofia adore les livres historiques, et lorsqu’elle a lu
l’histoire du soldat, je l’entendais pleurer dans son
lit. Je me suis demandé pourquoi je lui avais permis
de lire ce livre. Mais en même temps, ça lui amène
une autre compréhension du monde. Elle me parle
beaucoup des questions d’intimidation. »
Cette possibilité d’encadrer le choix des œuvres
qui feront vibrer les enfants ne dure toutefois qu’un
temps. Isabelle le perçoit d’autant plus qu’elle ne
partage pas toujours spontanément l’engouement
de ses plus vieux pour certaines productions
artistiques, notamment la musique rap. Elle continue
néanmoins de sentir que cette porte qu’elle a déjà
ouverte, en laissant ses jeunes s’exprimer, ou
encore en respectant leur silence, lui permet d’offrir
une oreille attentive et pas trop menaçante sur leurs
choix culturels : « C’est mon fils qui me sensibilise au
rap par les documentaires qu’il écoute sur la culture,
sur l’affranchissement. Moi aussi j’apprends. Je ne
sais pas tout ! Mais je pense aussi qu’il connaît bien
maman et qu’il sait que s’il a des arguments solides,
maman va moins sortir de ses gonds. »
Et d’ici à ce que le hip-hop ou d’autres passions
d’adolescent occupent encore plus de place à la
maison et dans les choix de sorties, Isabelle compte
profiter de chaque occasion pour renouveler, avec
ses fils, ces expériences de créations jeunesse qui
lui paraissent souvent plus innovatrices que ce qui
est proposé aux adultes… et pas seulement pour
ses fils : « J’y prends autant de plaisir, sinon plus,
que mes garçons. J’ai 3 garçons très sportifs, alors
il faut trouver les plages horaires qui conviennent à
chacun. Mais je ne regrette pas, grâce au plaisir que
je prends à certaines pièces. Donc, ce n’est pas un
sacrifice pour moi. »
En observant sa mère, du haut de ses 7 ans, Dahlia
a déjà pu remarquer que, pour elle aussi, le plaisir
semble partagé, à sa façon : « Parfois, quand je
regarde des pièces de théâtre, pas pour les très
petits, mais un peu pour tous, ma mère pleure aussi,
quand c’est triste. » Et c’est sans doute une partie
du doux secret qui fait que le dialogue se maintient…
par-delà les matins de fatigue.