Montréal pour Enfants vol. 18 n°4 La rentrée 2018 | Page 26

26 art et culture www.montrealpourenfants.com acteurs, mais des gens en général. On est à une ère où tout va très vite. Tout s’accélère. On n’est plus connecté à soi-même. On est toujours en réaction à quelque chose plutôt que d’être en introspection. Et cet état-là n’est pas que dense et grave : il peut être très serein, très tendre. Il faut juste être disposé à savoir qui on est. » Des personnages en quête d’émissaires Selon Sophie Labelle, directrice artistique de la Maison Théâtre, l’aventure est loin de se terminer lorsque le dernier mot du spectacle a été dit : « Si tu veux plus d’impressions ou de commentaires sur leurs émotions, sur les rapports de forces, il faut que tu ailles creuser un peu. Mais quand ils sortent de la salle, à 6, 7 ou 8 ans, ils vont te parler des per- sonnages, des histoires. » Marie-Eve souligne alors l’importance d’éveiller ceux qu’ils accompagnent à travers ces relations parfois étranges, parfois extraor- dinaires, à leur rôle de passeur, qu’ils aient ou non connu eux-mêmes la piqûre du théâtre lors de leur vie d’adulte ou d’enfant : « Ils ne captent pas tout comme les adultes ou les artistes peuvent le formuler, mais ultimement, ils ont les réponses en dedans d’eux et l’important, c’est qu’on les fasse jaillir, ces réponses, que l’on sache comment tirer les fils pour les aider à trouver leur réponse. » Encore faut-il se sentir apte à tirer ces fameux fils… C’est donc dans ce contexte que l’idée de faire appel à la philosophie pour enfants, dans le cadre des acti- vités de médiation culturelle, a germé dans l’esprit de Sophie et de son équipe de la Maison Théâtre. Son équipe s’active même à créer de nouveaux outils pour les parents, qui, eux aussi, peuvent se trouver confrontés à des questionnements qui les laissent perplexes, comme ceux qu’a pu entendre André Laliberté : « Dans Un cœur en hiver, il y a une petite fille qui demande à la Reine des neiges ‟À quoi ça sert de vivre ?” et la Reine lui répond ‟À rien”. C’est dur à dire. Il y a une petite fille dans la salle qui a dit ‟Moi aussi, des fois, je me demande à quoi ça sert de vivre…”. Tu aurais dû voir la tête de son père. Mais l’interrogation était là. On lui a permis de l’exprimer. » Mais pour que s’ouvre cette boîte de Pandore et que les tourments qui en jaillissent puissent être consolés, encore faut-il que les enfants aient la chance de fran- chir le seuil de la salle de spectacle ou de se retrouver face à toute autre forme de création qui saura rejoindre leur sensibilité. Et ce principe est aussi celui qui guide chaque jour le travail de Sophie : « Quand on a faim, on le sait, on le sent dans notre ventre. Mais quand on a faim de culture, on ne le sait pas. Et le problème est là. Ça veut dire que si tu n’es pas en contact avec les arts, tu ne peux pas savoir que cela manque à ta vie. » Merci à : André Laliberté, directeur général du Théâtre de l’œil www.theatredeloeil.qc.ca Marie-Eve Huot, codirectrice de la compagnie de Théâtre Le Carrousel www.lecarrousel.net Nini Bélanger, directrice artistique et générale du Projet Mû : projetmu.com Sophie Labelle, directrice artistique de la Maison Théâtre : www.maisontheatre.com Pour en savoir plus sur l’évolution du théâtre jeune public au Québec : www.maisontheatre.com/wp-content/ uploads/2017/04/vers-une-politique_WEB.pdf