Montréal pour Enfants vol. 18 n°4 La rentrée 2018 | Page 24
24
art et culture
www.montrealpourenfants.com
André Laliberté
Photo : Léon Gniwesch
tout de suite : c’est bon ou, si ce n’est pas bon, on
entend : ‟Quand est-ce que ça finit ? On s’en va-tu
?” C’est pour cela que l’on fait du théâtre : c’est un art
vivant. Ce qui se passe sur scène et dans la salle se
répond, c’est en interaction à partir du moment où il
se passe quelque chose, que ce soit en théâtre adulte
ou en théâtre jeunesse, nous, comme créateurs ou
comme spectateurs, c’est cela que l’on cherche. On
cherche le moment de magie », précise la metteure
en scène et directrice artistique du Projet Mû, Nini
Bélanger.
Un théâtre qui transforme
Marie-Eve Huot
Photo : Brigitte Thériault
Nini Bélanger
Photo : Manon Cousin
Sophie Labelle
Nini Bélanger décrit d’ailleurs cette rencontre avec
ce public spontané comme un des plus beaux défis
qu’un créateur puisse connaître. Devant ces audi-
toires plus restreints, souvent plus rapprochés, physi-
quement, des acteurs en chair et en os, elle s’attend à
ce que ceux-ci vivent la représentation avec une plus
grande intensité que sur les vastes scènes. Marie-Eve
a également vécu de tels états de grâce avec des
adolescents pour qui il fallut ralentir le tempo de la
présentation, afin de leur laisser le temps de gérer
l’émotion. Elle l’a aussi observé chez des parents
qui vivaient leur première expérience à vie de repré-
sentation parents-enfants : « Parce que justement,
quand un enfant a 18 mois, il est encore tout petit :
tu es encore une jeune mère. Et j’ai vu des mères
qui pleuraient parce qu’elles découvraient leur enfant
dans cet état et la grand-mère était émue elle aussi,
parce qu’elle voyait sa fille voir son petit-fils. »
Cette proximité ne transforme donc pas que l’histoire,
mais aussi ceux qui en sont témoins : « Les spec-
tacles m’ont mis en contact avec différents univers qui
ont fait en sorte qu’à un certain moment, mon esprit
s’est ouvert et j’ai réalisé que ce n’est pas tout le
monde qui avait le même parcours que moi » se sou-
vient d’ailleurs Marie-Eve, à propos de ses premières
expériences de spectatrice. Mais la suite des choses
lui a appris que ses propres œuvres pouvaient aussi
jouer un rôle fondamental pour ceux qui s’identifient
plus directement aux personnages, en permettant
d’habiller de mots des interrogations ou des silences
trop brûlants, et de les aborder ainsi avec plus de
soins et de façon moins solitaire. De même, Nini a vu
une fillette parvenir à évoquer la mort de son parent,
après l’une de ses pièces : « Ça faisait quelques mois