Magazine Kraemer KRAEMER MAGAZINE 05 | Page 41

Brigitte Bardot Quelle drôle d’idée que d’imposer la coupe Louise Brooks sous la forme d’une perruque à Brigitte Bardot ! Et pourtant, c’est bien précisément à ce moment-là que Camille, le personnage qu’elle incarne dans Le Mépris de Godard, finit par s’émanciper d’un époux qu’elle juge veule. Ce dernier a beau affirmer dans la scène culte du début du final qu’il l’« aime totalement, tendrement, tragiquement », il ne sait malheureusement pas se montrer à la hauteur de cet amour-là. La réponse est ce mépris que lui manifeste sa sublime épouse dans cette autre scène culte où l’on voit arborer un carré court noir, face au miroir. Sa réponse à la dispute qui vient de s’engager en dit long sur le fossé qui sépare les amoureux : « Ah ? Ça me va mal de dire des mots vulgaires ? Écoute : trou du cul… putain… merde… nom de Dieu… piège à cons… saloperie… bordel… […] Alors tu trouves que ça m’va toujours mal ? ». Dérangeante et absolument sublime, Brigitte Bardot, en garçonne brune, n’a jamais été aussi loin dans l’affirmation de l’urgence de l’émancipation féminine. Bérénice Béjo On l’admettra volontiers : on triche un peu. La coupe de Bérénice Béjo dans The Artist n’est pas le carré court de Louise Brooks, elle n’en est qu’une variante, légèrement ondulée, mais qu’importe, la boucle est bouclée ! Du cinéma muet des années 20 à ce sublime hommage de Michel Hazanavicius, l’éternel féminin puise dans le carré sa force de persuasion. Bérénice Béjo, une nouvelle fois, incarne cette incroyable volonté d’aller au bout de son désir : elle sait qu’elle aime, et que rien ne lui fera obstacle, même pas le dépit de l’acteur George Valentin, interprété par Jean Dujardin. En cela, elle est femme, et le restera à jamais !