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Daniel Gasser, triptyque pastel et encre, 2m X 0,95
Daniel Gasser
peintre à Strasbourg
Daniel Gasser avoue son
attachement à la figure humaine
comme l’expression de nos
sentiments. Rencontre avec un
artiste strasbourgeois qui affirme
de vraies convictions.
Qu’est-ce qu’un artiste aujourd’hui ?
Être artiste, c’est un mode de vie, cela
s’invente tous les jours. C’est bénéficier
d’un formidable espace de liberté,
d’une place privilégiée, mais pas facile
à tenir. Cette liberté est précieuse,
mais elle a un prix : être artiste reste un
engagement à vie, un défi permanent de
tous les instants. En tant qu’artistes, nous
sommes les observateurs de la société,
nous sommes chargés de lui donner
du sens et de la faire avancer. Le plaisir,
l’émotion, la conscience d’où nous
venons et la confiance dans l’avenir,
c’est la vérité, l’antidote à l’éphémère.
Quel regard portez-vous sur la culture
et l’art contemporain ?
L’art contemporain est souvent mal
compris, on le méprise et on le
tourne en dérision, pourtant 67 %
des Français voient dans l’art quelque
chose d’universel et d’essentiel pour
l’humanité. Ils comprennent l’art comme
un cheminement vers la beauté, ils
partagent l’espérance selon laquelle « la
beauté sauvera le monde ». Par contre,
20 % des Français voient dans l’art un
luxe inutile réservé à des privilégiés. Cette
hostilité est provoquée par le fait que l’art
contemporain a pris hélas une dimension
élitiste et est devenue un produit de
marché. Cotées sur Internet, les œuvres
d’art contemporaines sont devenues une
manne financière potentielle, qui n’exclut
pas les effets de mode au détriment des
travaux réellement de qualité. rebelle, excentrique, passionné et libre…
Il est très difficile de vivre rapidement
de son art, seuls 6 % des 54 000 artistes
environ déclarés en France obtiennent
des revenus artistiques confortables. Une
minorité de stars soutenues largement
par les institutions et les grands circuits
marchands deviennent de véritables
refuges pour spéculateurs. La grande
majorité des artistes fait tous les métiers
du monde de longues années pour
survivre : il y autant de créateurs qu’il
y a d’œuvres : il est donc impossible
d’établir une typologie. Le niveau de
revenus est le premier facteur d’inégalité
d’accès à la culture.
La figure humaine est centrale dans
vos œuvres.
La clé de mon travail est l’univers de
l’homme, le langage du corps qui
exprime ses souffrances, ses doutes, ses
jouissances, ses joies. C’est l’homme
porteur et ses désirs dans l’attente,
l’angoisse, la solitude, la complexité et la
vie. Je dessine toujours, poussé par une
certaine abstraction destructrice, mais
en contact permanent avec la réalité, le
dessin se confond alors avec l’écriture. Quel est, selon vous, le principal
critère de réussite d’un artiste ?
Le principal critère de réussite d’un
artiste pour le public est sa notoriété,
mais l’essentiel pour moi est le
bonheur qu’on m’a donné de créer, de
m’exprimer, de vivre de mon art, c’est
de réussir sa vie d’homme et d’artiste. Je
pense que l’envie de créer est naturelle
et inhérente à chacun ; il y a des talents
libérés et des talents inhibés Il n’y a pas
de mauvaise œuvre, il y a des œuvres
comprises ou pas.
Peut-on vivre de sa peinture aujourd’hui ?
Dans l’imaginaire des gens, l’artiste
c’est Van Gogh « une vie pénible,
dont le génie n’est reconnu qu’à titre
posthume » ; on reste encore sur cette
figure de l’artiste maudit, marginal,