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B. UNE ÉVOLUTION DES ACTEURS EN PRÉSENCE ET DES TECHNIQUES
MOBILISABLES
1. La multiplication des groupes armés non étatiques
L’évolution de la conflictualité passe aussi par l’évolution des belligérants.
Au plan quantitatif, le nombre de parties impliquées dans les conflits armés
s’est accru de façon exponentielle : un conflit sur trois se déroule entre deux parties
belligérantes, 44 % voient s’opposer trois à neuf parties et 22 % comptent plus de
dix forces rivales.
La hausse du nombre de parties impliquées s’est traduite par
l’apparition d’un grand nombre de groupes armés prenant part aux conflits.
En 1950, on comptait en moyenne huit groupes armés dans une guerre civile, il y
en aurait eu jusqu’à mille en Syrie en 2014. 40 % des États en situation de conflit
armé en 2017 étaient notamment confrontés à la présence de groupes armés
djihadistes.
Or, l’apparition de réseaux complexes de groupes armés implique de
nouveaux modes de diffusion du DIH.
D’une part, du fait des motivations de ces groupes. Pour les groupes dont
la motivation principale est financière, l’existence de conflits peut être une
composante essentielle du modèle économique adopté, par exemple en favorisant le
commerce illicite comme source de revenus. Pour les groupes dont la motivation
est principalement idéologique, les vingt dernières années ont été marquées par
l’apparition de groupes terroristes à l’idéologie nihiliste, qui rejettent totalement les
règles du DIH. Comme l’a souligné le CICR dans une étude parue en novembre
2018, intitulée Contenir la violence dans la guerre : les sources d’influence chez le
combattant , des « formes exceptionnelles de violence » sont apparues et sont venues
« compromettre les progrès réalisés, dans la promotion de la retenue dans la
guerre ».
D’autre part, du fait du mode de fonctionnement des groupes. Comme l’a
souligné le Secrétaire général des Nations unies dans son rapport 2018 sur la
protection des civils, la prolifération et la fragmentation des groupes armés ont
exacerbé l’asymétrie des conflits contemporains. En d’autres termes, nombreux sont
les groupes armés qui ont cherché à compenser leur infériorité militaire par des
stratégies qui contreviennent aux règles du DIH, notamment le principe de
distinction entre combattants et civils. Deuxièmement, s’il existe toujours des
mouvements armés structurés qui connaissent et appliquent globalement le DIH, la
majorité est dépourvue de structure hiérarchique centralisée, qui permet
traditionnellement d’assurer la transmission des normes et la formation des
combattants aux règles du DIH. Comme l’a souligné le CICR, dans son étude
précitée, les modes d’organisation de ces groupes restent très variés et impliquent
une adaptation des modes de diffusion du DIH.