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1. L’articulation avec la lutte contre le terrorisme
Cette question se pose tout d’abord par rapport au terrorisme. Au-delà des
questions suscitées par le développement de groupes armés parfois dotés d’une
idéologie nihiliste, avec lesquels le dialogue est impossible sinon à proscrire, la
présence d’actes de terrorisme dans de nombreux conflits armés contemporains
conduit parfois à une forme de déshumanisation des combattants, qui a en retour
des conséquences sur la capacité des États et des ONG à prôner l’atténuation des
conflits et le respect du DIH.
Surtout, des questions se posent au plan juridique. D’une part, les actes
de terrorisme sont interdits en temps de guerre par le DIH, comme en temps de paix,
par le droit international ou les législations nationales. Diverses dispositions des
conventions de Genève et de leurs protocoles additionnels proscrivent le recours au
terrorisme comme méthode de combat (1) , et l’article 33 de la quatrième convention
interdit « toutes les mesures d’intimidation ou de terrorisme ».
D’autre part, lorsque le terrorisme et les conflits armés tels que définis par
le CICR se superposent, il est possible que certains actes ne soient pas interdits par
le DIH, qui reste un droit des conflits, mais soient interdits par le droit pénal interne,
ce qui peut être le cas par exemple de certains actes dits de rébellion.
Au plan opérationnel, la superposition du terrorisme et des conflits
armés peut aussi créer des entraves à l’action humanitaire, au niveau des
autorisations données ou de la bonne circulation des financements (voir infra ). Il
peut arriver que dans certains États le simple fait d’intervenir dans une zone
contrôlée par tel ou tel groupe armé soit criminalisé, créant donc un risque
d’incrimination de l’action humanitaire. D’où l’importance, comme l’a souligné en
audition Mme Ghislaine Doucet, conseillère juridique principale de la délégation du
CICR à Paris, des clauses de sauvegarde juridiques, sur le modèle de la direction
européenne 2017/541 relative à la lutte contre le terrorisme :
– une clause de sauvegarde distinguant les situations d’usage et de non-
usage du DIH, au considérant 37 : « La présente directive ne saurait avoir pour effet
de modifier les droits, obligations et responsabilités des États membres découlant
du droit international, y compris du DIH. La présente directive ne régit pas les
activités des forces armées en période de conflit armé, au sens donné à ces termes
en DIH, lesquelles sont régies par ce droit, ni les activités menées par les forces
militaires d’un État dans l’exercice de leurs fonctions officielles, dans la mesure où
elles sont régies par d’autres règles de droit international » ;
– une clause d’exemption humanitaire, au considérant 38 : « Les activités
humanitaires menées par des organisations humanitaires impartiales reconnues
par le droit international, y compris le DIH, ne relèvent pas du champ d’application
(1) Articles 27, 33, 34 de la convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de
guerre, article 51§2 du premier protocole additionnel, articles 4 et 13 deuxième protocole additionnel.