TENDANCES
L'équipe Island bio de gauche à droite
(Island Bio team left to right): Clöé Chavry,
Madvee Muthu & Olivier Fanfan
À l’ère de la consommation frénétique dans laquelle se trouve notre
société, nous oublions parfois l’importance d’une nourriture saine. À l’île
Maurice, où l’agriculture traditionnelle reste encore parfois fortement
imprégnée de pratiques héritées du passé, les consciences commencent
à se réveiller. Le pays, qui en est encore à ses balbutiements en terme
de bio, est pourtant une pépinière d’initiatives inspirantes, appelant à
une agriculture plus raisonnable et responsable. En effet, l’intérêt pour
ce domaine semble avoir pris un tournant inédit, charmant tour à tour
consommateurs, agriculteurs et entrepreneurs. Misant sur des pratiques
agricoles plus écologiques, ces acteurs de l’agriculture à Maurice
travaillent à donner un souffle nouveau à une industrie encore trop
reléguée à l’arrière-plan.
Proxifresh, entreprise née sous l’impulsion de Yan Mayer, compte
parmi les pionnières en la matière. Créée il y a dix ans dans le but de
produire des fruits et légumes de qualité, elle prône une agriculture
raisonnée œuvrant pour un respect de l’environnement et de la santé
et n’ayant recours à des produits chimiques qu’en cas de force majeure
(par exemple, en cas d’attaque de ravageurs). Encadré par une équipe
d’agronomes français, Yan Mayer lance la société Pure Farming en
2016, misant sur « le moins de chimique possible pour le meilleur
rendu écologique possible », nous explique Yoann Michenet, agronome
partenaire de l’entreprise. Les fruits et légumes, testés et approuvés par
le laboratoire d’analyses Quantilab, peuvent donc être produits en plus
grande quantité à des prix plus abordables pour répondre à la demande
grandissante du marché.
Pour Yan Mayer, une agriculture biologique pure et dure reste
compliquée pour produire à grande échelle à Maurice. Pour mieux
comprendre les enjeux d’un tel mode d’agriculture, il est nécessaire de
démystifier ce concept qui prend de plus en plus d’ampleur dans nos vies
et dans nos assiettes. « Le bio, c’est avant tout un cahier des charges à
respecter. Mais ce cahier est différent de pays en pays. Quand on dit bio,
ça ne veut pas forcément dire sans produits chimiques », nous explique
Yoann Michenet. De plus, l’île présente des problématiques bien
particulières qui doivent aussi être prises en compte : un climat tropical
souvent difficile, des ravageurs propres au milieu (telle que la mouche
des fruits), un manque de formation et un lobbying assez présent sur les
produits phytosanitaires. Et pourtant, produire bio à Maurice ne relève
pas de l’impossible et d’innombrables petites structures militent même
en ce sens. C’est le cas d’Oliver Fanfan, un jeune homme bien décidé à
bouleverser les systèmes établis. Créateur des jardins communautaires
Island Bio, Oliver Fanfan a eu un rêve et l’a réalisé : créer un espace où
agriculture et social s’entremêlent. Island Bio, c’est avant tout un projet
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humain qui recueille des personnes en difficulté et leur donne le goût de
la terre. Son combat : « Qu’il y ait une justice de la santé, que tous aient
accès à de la nourriture de qualité et à petit prix, sans pesticides », nous
raconte-t-il. Un retour à la terre en respectant la biodiversité. Ce projet
révolutionnaire, qui cherche à briser les barrières sociales et économiques,
est aussi une philosophie de vie qui séduit et touche de plus en plus de
personnes. Avec un « supermarché à ciel ouvert », le client est donc
invité à choisir ses propres légumes et à interagir directement avec le
planteur, sans intermédiaire.
Les efforts pour une agriculture biologique ne manquent donc pas et la
naissance d’autres initiatives telles que Le Vélo Vert, Forena, Agribio, le
prouvent. Faire de l’agriculture sans pesticides n’est donc pas une idée
complètement utopique, mais les efforts restent tout de même plutôt
isolés, le rendement étant malheureusement trop faible et non viable
pour le privé, à moins d’être sponsorisé.
Même si ces pratiques peinent encore quelque peu à s’imposer sur le
marché local, tous s’accordent pourtant à dire qu’il y a une réelle prise de
conscience de la population quant au « manger sain ». Les producteurs
se tournent de plus en plus vers une agriculture raisonnée ou biologique.
Le véritable défi reste, selon Yoann Michenet, la mise en place d’une
souveraineté alimentaire, qui mettrait un point d’honneur à privilégier la
production locale et durable de produits sains et adaptés au milieu. Cette
nouvelle ère du bio à Maurice présente donc une grande richesse de
possibilités pleines de promesses qui ne demandent qu’à être exploitées.
In the hyperconsumerist society we are living in, it is often easy to
forget the importance of a healthy diet. In Mauritius, where traditional
farming may be widely dominated by practices of the past, consciences
are slowly awakening. And though organic farming is still at its early
stages, the island turns out to be a hotbed of inspiring initiatives for
the promotion of sustainable and eco-responsible agriculture. Indeed,
interest in the matter has grown like never before among consumers,
farmers and business developers. Actors of the Mauritian agricultural
sector are making a shift towards more ecological farming practices in
an attempt to revive an industry that has often been left on the back
burner.
Born under the impulse of Yan Mayer, Proxifresh has been a pioneer
in the field. The company, which was created ten years ago to produce
quality fruits and vegetables, has been advocating sustainable farming in
support of public health and environmental preservation, while limiting
the use of chemicals to emergency pest control only. Supported by a
team of French agronomists, Yan Mayer launched Pure Farming in