Le Baromaître - Juillet 2019 - N°1 Le Baromaître - N°1 (1) | Page 23
Dossiers du mois - le baromaître
Les sociétés d’in luenceurs comme alternative ?
Les macro-in luenceurs, comptant parfois uel ues
centaines de milliers de followers, font généralement le
choix de créer leurs sociétés d’in luence, a in de gérer leur
activité comme une entreprise à part entière plutôt ue
comme l’activité subsidiaire d’un indépendant.
Ils sont donc nombreux à proposer en plus de leurs
services, et au travers de plateformes professionnelles des
produits dérivés, voire de créer eux-mêmes des mar ues.
Ces in luenceurs devenus chefs d’entreprises représentent
des parts de marchés consé uentes et de réelles
opportunités pour les avocats affairistes.
D’autres sociétés ont fait le pari de regrouper les nano-
in luenceurs, parfois ne disposant « que » de 1000 ou 2000
followers pour ac uérir un poids plus consé uent aux yeux
des annonceurs, voire (comme BlaBlaCar pour les
covoiturages) de s’imposer avec le temps comme des
intermédiaires indispensables pour permettre à cha ue
intéressé de trouver l’in luenceur u’il lui faut, en fonction
de son domaine d’activité et de ses moyens.
Les débats font rage, mais en dé initive, il semble ue tous
s’accordent pour admettre u’en l’absence de création d’un
statut ui serait propre aux in luenceurs, la nature de leur
relation contractuelle ne pourra se faire dans les années à
venir u’au cas par cas. En tout état de cause, il n’est pas à
exclure ue le marché de l’in luence représente une
opportunité à ne pas man uer tant pour les travaillistes
ue pour les affairistes !
Il nous semble cependant que l’in luenceur aurait
vocation à appartenir au monde du droit des af aires.
D’abord on cons ate que les macros-in luenceurs, c’est-à-
dire, ceux réussissan , optent pour la création d’une
société. Surtout il nous semble que c’est bien le s atut de
« gérant » qui serait le plus à même d’assurer aux
in luenceurs ant une liberté éditoriale que la possibilité
de développer une activité commerciale.
Par ailleurs, la relation entre un in luenceur et un
annonceur est un déterminant supplémentaire des
obligations de l’in luenceur. Ainsi l’opération consistant
pour l’annonceur à associer sa mar ue au contenu
in luenceur en contrepartie d’un inancement relèvera du
régime du parrainage. L’enjeu de ces contrats sera alors de
déterminer le droit de regard de l’annonceur sur le
contenu et le droit d’usage de l’in luenceur sur la mar ue.
On co
On comprend alors ue la propriété intellectuelle est une
branche clef du droit des in luenceurs. À l’inverse,
lors u’un annonceur utilise le compte d’un in luenceur
pour promouvoir un produit, alors cette opération sera
susceptible de relever du régime de la location d’espace
publicitaire (note 13).
Et puis, les in luenceurs se devront de compter avec la
réglementation des secteurs dans les uels ils
interviennent ! Ainsi, la réglementation sur la promotion
des produits cosméti ues pourrait restreindre certaines
prati ues des in luenceurs du domaine.
Et uel avenir pour l’in luenceur ?
Les in luenceurs aujourd’hui, professionnels ou non,
doivent surmonter un nouveau dé i. Il leur appartient de
trouver l’é uilibre entre la sauvegarde de leur liberté
éditoriale, garantie d’un contenu authenti ue, et le
développement de relations commerciales avec les
annonceurs.
L’une des pistes pourrait être, à l’instar des
réglementations américaines (note 14) et canadiennes
(note 15), de prévoir une obligation de sincérité de
l’opinion. Or il nous semble ue la pierre angulaire de cet
é uilibre est la transparence de l’in luenceur vis-à-vis de
son audience. Indépendamment du droit, il semble ue
cette con iance dépende pour partie du souhait des
in luenceurs de faire preuve de transparence. Pour le dire
autrement, on ne peut ue souhaiter ue les in luenceurs
se dotent d’une déontologie propre à leurs activités.
À l’issue de cette brève es uisse, deux constats s’imposent.
En premier lieu, il est frappant de constater ue les grands
gagnants de ce régime sont les annonceurs, sur les uels ne
pèsent jus ue-là ue peu d’obligations. Il serait souhaitable
de leur voir appli uer certaines obligations, comme celle
de transparence. Un tel projet a d’ailleurs été déposé
s’agissant du domaine des produits de santé (note 16).
En second lieu, on constate ue la réglementation
française en matière d’in luenceurs suit le chemin de ses
voisins occidentaux, c’est-à-dire une régulation fondée sur
des recommandations et des prati ues professionnelles. Il
reste donc à espérer ue la communauté des juristes du
marketing d’in luence saura se faire guide et force de
proposition de cette régulation en gestation !
LE BAROMAÎTRE
la revue des élèves avocats
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