L'aut'journal no 321 - Juillet - Août 2013 | Page 16

juillet-août 2013 no 321 l’aut’journal • 16 Le fédéralisme des banques Le système bancaire canadien contre le Québec Pierre Dubuc quelconque influence sur les institutions bancaires. Aux États-Unis, la démocratie contre l’oligarchie La First Bank of the United States, première banque états-unienne, est fondée en 1791 par Alexander Hamilton. Cette banque à charte avait des succursales dans huit des principales villes du pays. Mais elle entrait en concurrence avec les pouvoirs des États constitutifs des ÉtatsUnis et les banques locales. Ces dernières réussirent à bloquer le renouvellement de sa charte en 1811. Au cours de cette première période de l’histoire bancaire états-unienne, la First Bank, représentant les intérêts de membres du Federalist Party et d’un groupe de financiers, a fourni le capital pour les premières étapes du développement agricole, commercial et industriel du pays. Cependant, dès le milieu du XVIIIe siècle, les petits fermiers commencent à contester les grands propriétaires terriens qui dominaient, dans chaque État, les assemblées électives. Inspirés par les idéaux de liberté et d’égalité, ces fermiers mobilisés et armés pour lutter contre les Britanniques, exigent une plus grande démocratie, y compris dans le système bancaire. Dans chaque État sont alors mises sur pied de petites banques, sans succursales, qui constituent autant de monopoles locaux. Rapidement, elles prolifèrent, protégées par le Xe amendement de la Constitution des États-Unis qui stipule que tous les pouvoirs résiduels, c’est-àdire ceux qui ne sont pas explicitement délégués au pouvoir central ou explicitement niés aux États, relèvent de ces derniers. Pour contrôler les banques, les États les obligent à renouveler périodiquement leur charte. En plus de les taxer, les gouvernements de ces États les forcent à détenir une partie de leurs dettes. Autour des années 1810-1830, les dividendes et les taxes provenant des banques représentent jusqu’à un tiers des revenus totaux des États. Ceux-ci ont donc intérêt à interdire les succursales interétatiques et, le président Andrew Jackson adopte leur point de vue lorsqu’il oppose son véto en 1832, au renouvellement de la charte de la Second Bank of the United States, créée en 1816 sur le modèle de la First Bank. Récemment, à l’occasion de la nomination de Stephen S. Poloz au poste de gouverneur de la Banque du Canada, en remplacement de Marc Carney, l’ex-député fédéral Louis Duclos rappelait que jamais un francophone n’a été appelé à diriger cette vénérable institution « canadian » en près de 80 ans d’existence. n effet, c’est une succession ininterrompue de 9 anglophones qui ont assumé ces prestigieuses fonctions depuis la création de la Banque en 1934. De plus, soulignait Louis Duclos, la Banque du Canada semble se soucier très peu d’assurer une présence équitable des francophones dans les hautes sphères de son organigramme où celle-ci est réduite à sa plus simple expression, tant au sein du Conseil de direction (1 sur 6) que chez ses 8 conseillers séniors dont aucun n’a le français comme langue maternelle. Enfin, selon la dernière mise à jour de son site internet, en date du 13 mars dernier, la Banque réserve également la portion congrue aux francophones au niveau des chefs de ses 12 divisions opérationnelles puisqu’ils n’occupent que 2 de ces postes. Une telle discrimination dans le système bancaire à l’égard du Québec ne serait pas nouvelle. En fait, tout le système bancaire canadien a été construit historiquement avec la perspective de tenir les francophones à l’écart. C’est la thèse que soutient le chercheur américain Charles W. Calomiris dans une présentation devant la Réserve fédérale d’Atlanta, le 9 avril 2013. Dans son texte, intitulé The Political Foundations of Scarce and Unstable Credit, le professeur de la Columbia University compare le développement historique des systèmes bancaires américain et canadien. Crises bancaires aux États-Unis, stabilité au Canada Charles W. Calomiris part du constat que les États-Unis font partie d’une liste de 19 pays qui ont connu, au cours de l’histoire, au moins deux crises bancaires majeures, alors que le Canada s’inscrit dans le groupe des « Happy Six », c’est-àdire les six pays dont le système bancaire a fait preuve d’une grande stabilité à traverser les crises. Cette différence ne s’explique pas, selon le professeur Calomiris, par les particularités proprement bancaires des deux systèmes, mais par leurs origines politiques. Les caractéristiques du système bancaire et la disponibilité du crédit ont été déterminées historiquement par les coalitions au pouvoir dans les deux pays. Aux États-Unis, un système bancaire très décentralisé est le produit de la Révolution américaine. Au Canada, un système bancaire très centralisé résulte des efforts des marchands du Canada-Uni et du gouvernement britannique pour priver les francophones et le Québec d’une E Cette décision marque, selon Charles W. Calomiris, la fin de la « période de copinage » entre le gouvernement central et une certaine élite financière, et la consécration de la domination d’une alliance politique entre les banquiers locaux et les populistes agrariens. Au cours de la guerre civile, le gouvernement fédéral américain crée un certain nombre de banques à charte pour satisfaire ses besoins financiers, mais sans remettre en question l’équilibre politique émanant de la coalition des banquiers locaux et des populistes. Cette coalition résiste même à la Grande Dépression, même si l’impossibilité de transférer des fonds d’un État à un autre rend ces banques locales extrêmement vulnérables aux aléas économiques. Une sécheresse dans un État peut conduire les banques locales à la faillite. Ce n’est qu’au cours des années 1960 que le système se disloquera. Les déposants retirent leur argent pour le déposer dans des fonds mutuels et les innovations technologiques contribuent à miner le système en permettant d’en contourner les restrictions. Au cours des années 1980 apparaissent des banques à c \?H]?X?[???\?X]HH?X??\??[\?]HX\??0?H?[??Z\?H??&[?]??H??\0?[Y[?0?H???\??[??K???[?\?Y][?\??\?[??]\?X?]Z\?][??H?YY?KS?X[[?\??]H?[??[?? ???[??[??Y??X?Y[??HX?H NNM??H?Z\??[??H]^p?Y?KX?[?]Y\?X?Y[\?]?X?\??X??\??[\?[???\]YH?[H]?[Y?K?]\?Z[H?H\?[\0???H?\[?[?\?H?H?]??]?\??\?H??H??X?\X?K??[YH??\?8?&X]????H[??H?\?H\?0???X??[Y\?0??]H??&p???H?]]??Y\?HH?Z[]H]YH\?8?&Z[?\??[?[?X\??]?HH??]?\??[Y[??[??[ ?XZ\???&Y\?0?[?H]]?H\??\?K?]H?[?YKH[?0?H?Y?\?]YH???H\???[????\??\?\???[?Z\?\???[Y?H]YHH?[Zp??H?[?]YH?[?YY[??KH?[???[??X[ H0?]0?H??p?YH?\?H[?0?HHH?\???[??0?]]?][?Y[??K??[?ZK\?X\??[??[??Z\?H[???X[]?ZY[??X]X??\[???[][?]?X?\?X\??[??\?0?]]?U[?\?XZ\?[??H?]?ZY[??]?[?\]Y\?8?&Z[?0?\[?[??H?X?H0?H?[?P??]Y?K?\??[H]\?Z]?Y?Y?p?H?[Y]?HH?]??\?]^??[????\?[?]?ZY[?0?Y?[[Y[?[\0???\?\???[????\?H?H??[??H]^0?]]?U[?\??H[???H8?&X\^Y\?[?H[??\?[?0?]]?[?Y[??K??????H???H?US?SH0??UT?T?Up?P??P??T?T?U0??T?T?Up?P??P??T?S?QS??U??0?\]0?HH?Z[?KSX\?YKT?Z[? 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