L'aut'journal no 321 - Juillet - Août 2013 | Page 12

juillet-août 2013 no 321 l’aut’journal • 12 mouvement souverainiste ou du Parti Québécois. Notre histoire et l’histoire des mouvements de libération nationale nous apprennent que les représentants des milieux d’affaires nationalistes se servent du mouvement national pour arracher des concessions à leurs vis-à-vis de la nation dominante, mais s’empressent, une fois celles-ci obtenues, de demander au « bon peuple de se tenir tranquille ». Nous devons toujours garder frais en mémoire que PKP a d’immenses intérêts au Canada anglais et que le développement de ses entreprises est tributaire d’organismes comme le CRTC et le gouvernement fédéral. La politique du pire Une lutte de libération nationale se caractérise par le fait que plusieurs classes et couches sociales ont un intérêt objectif à l’indépendance nationale, malgré leurs intérêts divergents ou conflictuels à d’autres égards. C’est pour cela que les mouvements de libération nationale prennent toujours la forme de coalitions, regroupant des représentants des intérêts des différentes classes sociales en cause. Amir Khadir et Québec solidaire répudient aujourd’hui cette approche. Ils écartent toute alliance avec d’autres partis politiques, font du Parti Québécois leur ennemi principal et s’inscrivent dans une approche « classe contre classe ». La seule conclusion logique qu’on peut tirer de leur stratégie est qu’ils misent sur une défaite du Parti Québécois – et ils vont y contribuer – dans l’espoir qu’il entraînera son éclatement et qu’ils en récupéreront les débris. C’est la « théorie de la flottille ». C’est aussi la politique du pire. Elle assurerait la victoire du camp fédéraliste et sa domination sans partage sur le Québec pour de nombreuses décennies. Le Québec serait ravalé au rang de simple province, marginale dans le nouveau Canada tourné vers l’Asie. Andrés Fontecillas, le nouveau porte-parole de QS, pourrait expliquer à ses membres les conséquences d’une telle politique, qui était celle du MIR (le Mouvement de la gauche révolutionnai- re) dans son pays d’origine, le Chili. Le MIR, très critique à l’égard du gouvernement Allende, trouvait des vertus au coup d’État de Pinochet parce qu’il croyait que « les choses seraient plus claires » et qu’on assisterait, enfin, à un affrontement « classe contre classe ». On connaît la suite. Les militaires chiliens ont décapité le mouvement populaire et, bien évidemment, le MIR. Le coup d’État a inspiré les militaires des pays avoisinants, dont celui de l’Argentine où les militants du MIR avaient cru pouvoir trouver refuge. Des voix discordantes Depuis le congrès de Québec solidaire, des voix discordantes se font entendre. Des militants expriment leur mécontentement à l’égard de ses conclusions. Plusieurs, dont les militants du Parti communiste, critiquent la décision de proscrire les alliances. D’autres, comme Pierre Mouterde, qui anime le site Internet « Presse-toi à gauche », remettent en question l’analyse de la conjoncture à la base de ces décisions. Notre lutte de libération nationale est une lutte complexe où les raccourcis ne sont pas permis. L’indépendance nationale est une nécessité de plus en plus criante et tout l’art de la politique, pour paraphraser Richelieu, est de rendre cette nécessité possible. * Respectivement président et secrétaire du SPQ Libre ET MAINTENANT EN UNE PLUME MAÎTRISÉE ET UN BONHEUR DE LECTURE À CHAQUE PAGE. Jean-François Nadeau Plus on est de fous, plus on lit LIBRAIRIE Radio-Canada