nuit … « Je pense qu ’ il dormait avec son saxophone » racontera un autre élève de Mike Guerra . Il pratique avec Benny Golson , l ’ un et l ’ autre alternant au piano pour s ’ accompagner mutuellement . Avec Jimmy Heath , il fréquente la bibliothèque de Philadelphie pour écouter les disques de Stravinsky , Chostakovitch et leurs contemporains . Ensemble , ils explorent le registre aigu du saxophone avec les méthodes Studies in High Harmonics de Ted Nash et Top Tones for the saxophone de Sigurd Rascher . Ils étudient les solos des boppers et leur usage de la superstructure des accords , apprennent à enchainer toutes les tonalités . Le saxophoniste Nick Nicholas se souviendra avoir pratiqué avec Trane en improvisant ou en jouant à l ’ unisson avec un enregistrement du Concerto pour orchestre de Béla Bartók .
Les années d ’ anonymat . Trane court le cachet et la jam session , participe au big band que Jimmy Heath dirige de 1946 à 1949 sur le modèle de celui de Dizzy Gillespie , et se produit avec lui à l ’ Apollo Theater de Harlem en septembre 1948 . Deux mois plus tard , il est engagé par Eddie « Cleanhead » Vinson . Vedette montante de ce rhythm and blues naissant que l ’ on appelle encore « jump blues », ce chanteur et saxophoniste alto s ’ intéresse également au bop dont il adopte le répertoire pour quelques instrumentaux . C ’ est au ténor que Trane est alors sollicité , une occasion de se démarquer de Charlie Parker en se rapprochant de Lester Young , plus linéaire et fluide , tout en décontraction , d ’ une modernité harmonique « naturelle » tirée des ambiguïtés modales du blues . À vrai dire , Parker en est l ’ héritier direct , mais en combinant cet héritage à son contraire , celui du ténor Coleman Hawkins , le « père du saxophone jazz ». Et de ce dernier , Trane va adopter la hâte à décortiquer l ’ harmonie des morceaux pour les arpéger sous tous leurs angles , comme il le fera sur « Giant Steps ». Convié à rejoindre le saint des saints du bebop , le big
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