transmission compagnons 17
Journée dédiée à la découverte de la pâtisserie sur les plateaux de Rungis pour des jeunes du programme d ' inclusion .
Lors d ' un jeu de piste pour découvrir le patrimoine parisien . prises d ’ accueil , la nature des parcours proposés … Le parti pris a été de tester le plus de pistes possibles pour en retenir et en écarter . Nous avons alors modélisé de façon universitaire le résultat de ces tests en ce que nous appelons " des designs d ’ organisation ". Le premier arbitrage a porté sur l ’ individualisation ou l ’ aspect collectif du parcours proposé aux jeunes . L ’ individualisation demande beaucoup de moyens , ce qui limite sa faisabilité . L ’ approche collective peut enfermer les bénéficiaires du " 100 % inclusion " dans un groupe aux mêmes codes - le cloisonnement entre ces jeunes du " 100 %" et les autres apprenants des Compagnons devait être proscrit . Il a donc été décidé d ’ opter pour un entre-deux : les jeunes ont alterné entre des temps de formation individualisés et ceux en groupe .
Il y a aussi eu des essais au niveau de leur familiarisation à des métiers . Ils ont été amenés à en tester plusieurs avant de choisir celui qui leur plaisait . Ils étaient mis en situation ou utilisaient des outils comme des jeux pour découvrir un grand nombre de métiers . La solution à retenir est sûrement un entre-deux encore une fois . Le calendrier du dispositif a été assoupli pour que les jeunes puissent tester d ’ autres métiers si leur premier choix était inadapté . Nous nous sommes interrogés sur la pertinence de faire accompagner les nouveaux bénéficiaires par d ’ anciens bénéficiaires dans une sorte de parrainage . Cela sera peut-être essayé à l ’ avenir .
Autre arbitrage , la progressivité … Fallaitil les immerger immédiatement en entreprise avec le risque d ’ un choc ? Ou les y amener par la suite ? Les deux ont été tentés . Nous nous sommes demandé s ’ il fallait préserver les différences des jeunes du " 100 % inclusion " ou au contraire chercher à leur forger une nouvelle identité au contact des Compagnons . L ’ identité des Compagnons étant extrêmement forte , il est clair que ceux-ci acculturent . Indubitablement , les jeunes bénéficiaires sont amenés à changer à leur contact , avec cette possibilité d ’ avoir une identité valorisante et positive . Toutes les techniques de socialisation ont été explorées dans le cadre de ce dispositif . Nous pouvons nous appuyer sur ces enseignements pour la suite .
SI CHEZ NOUS COMME CHEZ LES COMPAGNONS , IL Y A UNE GRANDE VOLONTÉ D ’ ACCUEIL ET DE FORTES VALEURS , IL FAUT LAISSER LE TEMPS AUX JEUNES ACCUEILLIS DE S ’ INTÉGRER .
Comment inclure par et dans le métier ? Le dispositif a été une manière de revisiter ce qu ’ est un métier , une démarche de construction d ’ image attractive et une identité du métier . C ’ est une approche subjective que j ’ ai de mon métier quand je dis : " Je suis charpentier ! " : cela recouvre la fierté de l ’ exercer ainsi que l ’ image renvoyée auprès de l ’ entourage et de la société . Cela relève aussi objectivement de gestes , d ’ outils , de personnes avec qui l ’ on interagit dans les maisons . Le dispositif " 100 % inclusion " revisite toutes ces dimensions des métiers de façon à générer une appartenance chez les bénéficiaires . Nous avons travaillé sur ce qu ’ est l ’ image d ’ un métier , sur la manière dont un jeune va fabriquer un système de préférences à l ’ égard d ’ un métier : en premier lieu par le rapport à la matière ( ils le découvrent au travers d ’ un certain nombre d ’ activités proposées ), par les tâches à réaliser ( leur variété ou leur complexité ), par l ’ environnement de travail ( individuel ou collectif , en intérieur ou dehors ), par ses résultats tangibles immédiatement ou plus tard , par l ’ utilité sociale … Les jeunes évoquent aussi la fierté d ’ intégrer un corps de métier des Compagnons du Devoir . Ce n ’ est pas juste un travail qu ’ on leur donne , mais un ancrage très solide pour eux .
Que va devenir le dispositif ? L ’ inclusion , cela s ’ apprend , aussi bien pour les bénéficiaires que pour les formateurs , et cet acquis se transmet même . Nous allons nous baser sur tous ces apprentissages pour faire fonctionner au mieux le dispositif . L ’ inclusion , c ’ est un peu comme un métier . Un métier , on l ’ exerce avec des outils . Nous en avons développé maintenant pour le dispositif " 100 % inclusion ". Un métier , c ’ est aussi un savoir-faire . Nous souhaitons mettre en place des ateliers de codéveloppement professionnel : les formateurs partageront par ce biais leurs bonnes pratiques , que nous documenterons ensuite . Un métier , c ’ est aussi une organisation dans un collectif . Là aussi , nous allons nous appuyer sur les enseignements des designs de cette expérimentation . Un métier , c ’ est aussi une communauté ; nous avons pour projet de créer des communautés de pratique pour qu ’ il y ait un sentiment d ’ appartenance des formateurs impliqués dans le " 100 % inclusion ". »
Propos recueillis par Marie-Laure Gendron
Le « 100 % inclusion » chez les Compagnons du Devoir en vidéo : https :// www . youtube . com / watch ? v = UIRc8ILp8IA
# 340 / Mai 2024