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UNE LEÇON de vie

Le 26 novembre à la maison de Paris , Saifoulaye Sow , en CAP Chaudronnier chez les Compagnons du Devoir depuis la rentrée 2019 , a proposé à la communauté une causerie sur son parcours , de sa Guinée natale jusqu ’ à l ’ Europe . Il a rencontré de nombreuses embûches lors de son arrivée à Paris jusqu ’ à la construction actuelle de son avenir chez les Compagnons . Voici en quelques lignes son histoire .

À l ’ initiative de Quentin Métivier , prévôt de la formation de Paris et de Champs-sur-Marne , Saifoulaye , âgé de 19 ans , est venu nous livrer un témoignage poignant et admirable de son expérience en tant que mineur nonaccompagné ( MNA ). En écoutant son histoire racontée avec beaucoup d ’ authenticité et de transparence , nous avons découvert sa réalité lorsqu ’ il résidait en Guinée , son pays d ’ origine . Il nous a confié la perte de ses proches , l ’ impossibilité de suivre une scolarité , le contexte économique et social du pays . Le jeune homme a témoigné par la suite de son exil , des conditions de voyage périlleuses entre la Guinée et l ' Europe : l ' enfer de la Libye , la traversée de la Méditerranée , l ' arrivée en Italie , puis en France .

Saifoulaye lors d ' une de ses interventions ( photo prise avant la pandémie ).
OBSTACLE SUR OBSTACLE Lorsque Saifoulaye arrive seul en France en 2015 , les obstacles à surmonter sont nombreux : trouver « les bonnes portes où frapper », prouver sa minorité pour bénéficier d ’ un accompagnement social , la situation d ’ exclusion scolaire , l ’ hébergement à l ’ hôtel , mais aussi la vie sous un pont à Créteil pendant plusieurs mois . Une procédure d ’ évaluation est réalisée systématiquement par le conseil départemental afin de reconnaître ou non la minorité des MNA . L ’ évaluation de la situation doit permettre de déterminer le statut juridique du jeune , en affirmant ou en rejetant le récit de ce dernier autour de sa minorité et de son isolement . Un jeune reconnu mineur relève alors du droit commun de la protection de l ’ enfance nonobstant tout critère de nationalité et d ’ origine . Mais l ’ Aide sociale à l ’ enfance a refusé d ’ acter la minorité de Saifoulaye , le laissant ainsi à la rue sans solution pérenne de logement .
Saifoulaye nous a démontré à quel point son vécu et ce sentiment d ’ avoir été laissé à la porte de l ’ école de la République française ont constitué le pivot central de son engagement . Avec d ’ autres jeunes ayant vécu la même expérience d ’ exclusion scolaire , il a créé le collectif « École pour tous » en 2018 : MNA , enfants de parents vivant en bidonville , dans des squats ou dans des hôtels sociaux . Leur union leur a donné la force de réclamer ensemble le droit de rêver à nouveau , car le droit à l ’ instruction est universel . Des vidéos à destination du ministère de l ’ Éducation nationale ont été réalisées dans le cadre de la journée internationale des droits de l ’ enfant en novembre 2019 ; de nombreuses lettres lui ont été envoyées ainsi que des pétitions signées , pour exiger qu ’ aucun enfant ne soit plus exclu de l ’ instruction scolaire .
DES COMBATS À MENER Grâce à la force de leur détermination et à la persévérance du collectif , leur démarche citoyenne a été entendue . L ’ objectif était la publication du décret d ’ application de l ’ article 16 de la loi « Pour une école de la confiance »,
# 305 / Mars 2021