Colloque Julius Koma COLLOQUE corrigé le 4 juin 2017 | Page 60

Nous avons été d ’ une vanité incroyable puisqu ’ on s ’ est donné la création divine , on s ’ est donné le langage , on s ’ est donné l ’ intelligence , on s ’ est donné toutes sortes de qualités que n ’ auraient pas les animaux . On a tout le temps élevé des murs qui valaient bien ceux de Berlin , aussi solides et aussi incongrus que ceux -là entre les animaux et les hommes . Je crois que cette science relativement récente qu ’ on appelle l ’ éthologie va encore nous en apprendre beaucoup plus tous les jours . Nous découvrons que la chaîne du vivant est une continuité et que c ’ est plutôt le Darwinisme qui a raison plutôt que les superstitions populaires . Par conséquent , je fais cette réflexion un peu polémique en m ’ appuyant sur l ’ article premier des droits de l ’ homme : « tous les hommes naissent égaux en dignité et en droit » ne faudrait - il pas d ’ abord l ’ appliquer aux vivants avant de s ’ en préoccuper pour les dépouilles . Bien sûr les morts n ’ échappent pas à des profanations , puisqu ’ on y a fait une discrète allusion hier ainsi : les charniers , les fosses communes , les exclusions pour raisons religieuses malgré la charité proclamée comme étant une vertu fondamentale . Il y aurait beaucoup à dire sur ce plan là . Par conséquent , devant tous ces problèmes , je crois que la meilleure réponse est celle qui nous a été fournie de façon magistrale hier par le professeur Louryan . C ’ est la réponse scientifique : l ’ anthropologie . Son étude englobe tous les aspects de la vie et tous les aspects de la mort qui peuvent être enrichissants . On nous a bien démontré que grâce aux restes , on peut faire des progrès scientifiques extraordinaires qui vont bénéficier aux vivants . Je ne sais plus qui a dit : « Laissons les morts pour les morts ». Les morts sont utiles pour les vivants . Le progrès médical , on l ’ a montré hier , est incontestable notamment dans le sujet qui nous préoccupe , celui du gigantisme . Grâce à Julius . Autre chose : il faut souligner la puissance de ce qu ’ un journaliste a appelé à propos des médias , l ’ émocratie ( la puissance de l ’ émotion ), le rôle de l ’ émotionnel qui peut être sublime lorsqu ’ il est transcendé notamment par l ’ art . mais qui peut conduire aussi à des choses plus intéressantes . De même qu ’ il faut distinguer la curiosité vulgaire de la curiosité scientifique , il faut distinguer ce que la sensibilité peut nous apporter mais en quoi elle peut nous tromper , nous égarer , nous rendre plus ou moins , et je mets de gros guillemets « fou ». Se pose alors aussi le problème de la mise en scène de tout ça . Comment induire une curiosité qui soit saine , qui ne soit pas du voyeurisme , qui ne soit pas quelque chose de vulgaire ou qui ne soit pas liée à des profits un peu douteux ? Le problème essentiel en éthique me semble-t-il , est celui de la morale , qui tourne autour de la constitution de la personne et du respect de cette personne . On peut la sacraliser avec tous les risques de la sacralisation , mais aussi on peut se méfier de ce qu ’ on appelle volontiers le charisme . Et là aussi , nous voyons jouer une espèce de combat permanent entre le rationnel et l ’ irrationnel . Une personnalité qui a du charisme , n ’ a pas toujours un charisme établi sur des valeurs humaines souhaitables ou respectables . Des exemples dans l ’ histoire sont assez parlants sur ce plan là et on le voit encore aujourd ’ hui par exemple dans certaines sectes évangéliques qui sont en train de conquérir l ’ Amérique latine , l ’ Afrique et peut-être demain l ’ Europe où des pasteurs « autoproclamés » ou même choisis par une population ou par un groupe quelconque sont d ’ abord des personnalités qui savent éblouir les foules , leur promettre l ’ impossible et donc profiter des naïvetés , des croyances , du désespoir et de la misère . Tout cela n ’ est pas très joli et je me demande dans quelle mesure le pauvre Julius Koch a aussi été victime de cette attitude qui est de profiter de ce qu ’ il pouvait avoir de charisme . C ’ est l ’ aspect positif que j ’ ai évoqué tout à l ’ heure de la monstruosité . J ’ en arrive pratiquement aux conclusions . Je crois qu ’ il serait intéressant d ’ interroger la fortune mythique et littéraire du géant . Il y a quelques éléments qui ont été affichés . Remarquez que c ’ est toujours au masculin . Je ne crois pas qu ’ on parle de géante quelque part . Je n ’ en ai jamais entendu parler . C ’ est amusant de se rendre compte qu ’ il y a une super valorisation de la virilité ou du machisme . Ça va de la mythologie grecque qu ’ on a
60