Colloque Julius Koma COLLOQUE corrigé le 4 juin 2017 | Page 49
enthousiaste, à l’idée de paraitre ainsi après sa mort et que ceux à qui ça ne convient pas,
n’aillent pas voir l’exposition et ne consentent pas à ce don voilà tout. Bien oui, pourquoi pas
après tout ? Ne vit-on pas dans une époque qui repousse quasi chaque jour les limites de ce
qui est admis en ce qui concerne la possession de notre corps. La réification du corps ne
progresse-t-elle pas quand on admet les mères porteuses ou le don d’organe ? Alors certes
les législateurs se montrent très souvent circonspects en matière de bioéthique. Ils visent à
essayer de marier progrès technologique et médical et valeurs morales. Mère porteuse
d’accord mais pas de lucre, don d’organe d’accord mais anonyme. Pourtant certains veulent
parfois aliéner leur corps plus loin comme ces artistes qui vendent leurs corps modifiés,
tatoués ou scarifiés à un tiers, avec une libre disposition qui commence avec leur propre
décès. 150000euros c’est le prix de la transaction entre Tim Steiner de 31ans tatoué par
l’artiste belge Wim Delvoye et un collectionneur allemand, le contrat signé prévoit que le
collectionneur puisse non seulement disposer de l’œuvre sur son porteur, donc de l’homme,
trois fois par an pour l’exposer mais aussi la revendre ou la léguer comme n’importe quel
autre bien, la surface tatouée devra donc être détachée et revenir au propriétaire, ajoute la
galerie qui précise qu’il s’agit de la première transaction de ce type dans le monde. Ils sont
tous fiers. Et Tim le porteur qu’on a interrogé a mentionné que désormais son existence
même avait un sens. Permettez- moi d’être surpris, choqué, interpellé, après tout n’est-on
pas à l’heure du porno « homemade » sur Facebook, ne postons-nous pas des photos
d’accidents mortels de la route sur les réseaux sociaux. Des documents bruts, qui foulent au
pied la vie privé ou l’intégrité du corps n’envahissent-il pas le net tous les jours ? Ne met-on
pas aussi régulièrement l’échographie de son bébé sur le réseau ? Même le film de
l’exploration de son intestin grêle, je l’ai vu. Alors est-ce de l’exhibitionnisme ? Est-ce de la
catharsis ? Sans doute un peu de tout ça. La semaine dernière encore des observateurs
estimaient que les clips vidéo de certaines chanteuses deviennent si sexy, qu’on débarque
dans le porno soft. Alors la tendance irrite ou ravit, commente le commentateur. Est-ce une
vraie libération de la femme, qui fait exactement ce qu’elle veut de son corps et qu’elle
montre ? Sans plus jamais devoir s’inquiéter de regard extérieur, ou n’est-ce que vile
récupération marketing ? Je vous laisse le soin de trancher. Pourtant l’indisponibilité du
corps humain est un principe juridique posant des limites à la libre disposition de soi. Selon
lequel le corps humain ne serait pas une chose pouvant faire l’objet d’un contrat ou d’une
convention. Bien ce n’est pas universel sur la planète et ça n’a certainement pas été le cas
dans l’histoire. Alors pour le code civil français on l’a rappelé, il ne peut être porté atteinte à
l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité thérapeutique pour la personne, le
consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement. On le voit la question de
consentement revient toujours au centre du questionnement éthique. Si l’histoire du brave
géant anglais nous heurte c’est parce que nous savons qu’il était opposé à une autopsie et
nous restons dans le doute pour Constantin. Si des hommes vendent la peau de leur dos, si
des femmes considèrent que s’exposer presque nue est le summum de la libération car de
contrôle sur soi, pourquoi priverait-on quelques centaines de jeunes élèves de vibrer en
observant un fémur de 76 cm ? Franchement ? Et tout simplement parce que la norme du
passé n’emporte pas nécessairement la norme du présent ou du futur. Si le squelette de
Constantin fut conservé de bonne foi et sans doute dans l’espoir de comprendre donc sans
doute de soigner un jour et d’éviter d’autres Constantin et c’est d’ailleurs ce qui est arrivé
dans la réalité, la connaissance de la maladie a permis de la traiter. Il n’est pas sûr que
seules des considérations scientifiques ont été prises en considération à l’époque où on a
gardé ses os. Parce qu’à la même époque le mélange entre spectacle et science font les
beaux jours des expositions de cire anatomique. Certes, dans ces musées qui tournent que
dans les foires comme le musée Fuji ou le musée Spitzner on trouve aussi des bocaux de
formol avec quelques monstruosités. On exhibe un géant, vrai ou faux, une femme à barbe,
mais on exploite aussi des collections authentiques de cires anatomiques qui servaient au
18 ème siècle de support à l’enseignement en anatomie, de la chirurgie et de la médecine
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