– Qu’est-ce qui ne va pas ?
Le sculpteur ne dit rien avant d’avoir rejoint son ami, assis au petit salon qui meublait l’espace à la gauche de son bureau.
– Rien de grave, je veux juste rompre le contrat que j’ai avec Emilia.
– Quoi ? hurla presque Lysandro en se levant à demi de son siège.
Le regard vert se mit à pétiller et Lysandro se rassit, suspicieux.
– C’est quoi le problème ?
– Aucun. Je voulais juste voir ta réaction.
Marco éclata de rire et Lysandro se raidit. Il attendit calmement que son ami se reprenne et ne lui annonce la raison pour laquelle il souhaitait lui parler.
– Il n’y a aucun problème, mais je veux quand même rompre le contrat avec Emilia. Mieux que ça, je veux te la racheter.
Un sourire commença à étirer les lèvres de Lysandro.
– Combien pour le contrat ?
– Pourquoi ?
Il y eut un long silence avant que Marco ne se décide à avouer ce qu’il avait derrière la tête.
– Je veux l’épouser.
– Je me demandais quand tu allais te décider !
Une légère rougeur colora les joues du sculpteur tandis que son regard évita celui de son ami.
– Alors ? Combien ?
Lysandro eut une moue songeuse.
– Eh bien… Emilia est un excellent investissement… Je dirais les fiançailles et le mariage ici même et un dernier concert, en privé, juste pour mes employés.
Marco éclata de rire avant de retrouver un minimum de sérieux.
– Tu es sérieux ?
– Oui, écoutes, j’adore Emilia et tu es un de mes meilleurs amis. Je n’ai aucun intérêt à te faire payer pour quelque chose que j’attends depuis ta rencontre avec Emilia. De plus, tu oublies que je ne suis pas mon père. Mes hôtes sont tous libres de partir quand ça leur chante !
Le sculpteur eut la décence de paraître contrit puis se leva et lui tendit la main. Lysandro se leva à son tour, ignora superbement la main tendue, fit le tour de la table basse qui les séparait et vint le prendre dans ses bras.
– Je suis content pour vous.
– Enfin… Emilia n’a pas donné son accord encore…
– Comme si elle allait dire non !
Ils éclatèrent de rire de concert. Quand ils eurent été calmés, Lysandro servit deux verres de whisky pour fêter ça.
– Alors qu’est-ce qui t’a décidé ?Marco fit tourner son verre entre ses mains avant de répondre.
– J’ai enfin retrouvé sa famille. Après son enlèvement, ils ont émigré à Tokyo. J’ai rencontré une de ses sœurs par hasard chez des amis communs.
Les yeux de Lysandro s’arrondirent comme des soucoupes.
– Ça, c’est une bonne nouvelle. Malgré mes recherches, je n’avais pas réussi à les retrouver. Ils ont changé de nom n’est-ce pas ?
Marco acquiesça d’un mouvement de tête.
– Ce sera un cadeau de mariage parfait.
Pendant plusieurs minutes, ils parlèrent du futur mariage, puis Marco se souvint d’un détail qui l’avait choqué en arrivant à l’Orchidée.
– Tu devrais peut-être songer à te ranger aussi. Il semble que t’aies trouvé ta propre perle ?
– Tu parles d’Ashim ?
– Oui. Il porte bien ton kimono, non ?
Il y eut un silence avant que Lysandro ne réponde.
– C’est exact. Je veux ce gamin mais lui, c’est autre chose…
– Qu’est-ce que tu veux dire ?
– Il est venu se venger de mon père.
Un des sourcils de Marco s’arqua, mais il ne dit rien, attendant la suite.
– Ne sois pas surpris, si un type avait fait la même chose à ma mère, je me serais aussi mis en tête de lui faire payer.
– Mais ton père est mort, et de ta main en plus !
– Ça, il l’ignore.
– Et qu’est-ce que tu vas faire ?
Lysandro soupira.
– J’attends qu’il se décide à agir.
– Ça ne fait pas loin de trois semaines qu’il est là. Il n’a encore rien tenté ?
– Non, je pense qu’il prend d’abord ses marques et puis, je me suis arrangé pour ne jamais être seul en sa présence.
– Il est dangereux ?
– Non. Il est juste ivre de vengeance donc imprévisible. Peut-être devrais-je lui laisser une chance…
Marco secoua la tête en voyant le rictus vicieux qui étirait les lèvres de son ami.
– Tu es fou, tu le sais au moins ?
– Je suis au courant.
Son ami ricana et se leva.
– J’ai rendez-vous avec Emilia, je dois te laisser.