B2V B2V MEDIA AVRIL 2019 | Page 14

parole d’expert observatoire des mémoires Quand la mémoire devient incontrôlable La mémoire intervient dans de nombreux actes de la vie quotidienne, mais également dans notre personnalité et notre identité. S catherine thomas-antérion 14 on dysfonctionnement a un impact majeur sur les personnes touchées et leur famille. À commencer par les patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Perte de mots, de gestes, puis de la reconnais- sance de l’entourage en sont les symptômes bien connus. « La maladie est liée à l’accumula- tion de deux protéines fabriquées en excès et à la dégénérescence de neurones de l’hippocampe et des cortex associatifs, explique Catherine Thomas-Antérion, neurologue et membre du Conseil scientifique de l’Observatoire B2V des Mémoires. Des médicaments existent. Ils ne sont pas curatifs, mais améliorent le compor- tement des malades. » En parallèle, l’art-thé- rapie et l’exercice physique ont prouvé leur efficacité dans la stimulation de l’attention et l’oxygénation du cerveau. Enfin, l’adaptation de l’environnement et le soutien de l’entou- rage sont fondamentaux pour permettre aux patients d’avoir le meilleur quotidien possible. « Il est important de ne pas rater le moment du diagnostic et de l’annonce. Celle-ci a un impact sur la dimension émotionnelle du patient et de sa famille. Elle va conditionner la suite. » Des événements violents et imprévus peuvent également avoir un impact sur la mémoire. Une agression, un attentat, un tremblement de terre… peuvent être à l’origine d’un syndrome de stress post-traumatique, dont « le symptôme cardinal est l’intrusion d’images de l’événement, de jour comme de nuit, qui donne l’impression de le vivre au présent », décrit la biologiste Isa- belle Chaudieu. La mémoire traumatique est fortement émotionnelle et sa gestion par le cer- veau va dépendre de plusieurs facteurs, dont la nature de l’événement lui-même, l’histoire de la personne et le soutien social qu’elle reçoit. Pour remettre le souvenir à sa place, dans le passé, plusieurs thérapies sont possibles. « Les psycho- thérapies cognitives et comportementales ont fait leurs preuves depuis longtemps, et récem- ment l’EMDR [eye movement desensitization and reprocessing], qui agit sur l’extinction de la peur ». Certains médicaments peuvent venir compléter les soins, mais ils n’enrayent pas tota- lement le trouble : les bêtabloquants inhibent la peur, et les antidépresseurs vont améliorer l’humeur, mais n’agissent pas sur la mémoire. C’est lorsqu’elle dysfonctionne que l’on se rend parfois compte de l’importance que la mémoire tient dans notre quotidien et notre personna- lité. Mais quelles que soient les causes de ses défaillances, aucune thérapie n’est suffisante sans le soutien bienveillant de l’entourage. l’exercice physique, efFIcace dans la stimulation de l’attention et l’oxygénation du cerveau.