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Au moment où Donald Trump sidère le monde entier en remportant la présidentielle 2016, comment le cinéma américain regarde-
t-il la politique ? Réponse en 10 films. Le cinéma et la politique américains, c’est une vieille histoire presque consanguine. D’abord
parce que le cinéma, même s’il l’est moins maintenant, a toujours été considéré comme un puissant outil de propagande par tous
les gouvernements possibles. Ainsi, même si la politique n’est pas leur sujet apparent, beaucoup de films américains ont porté
dans le monde entier une image et une idée de l’american way of life et de ses valeurs fondatrices, et cela que leurs auteurs ou
producteurs soient d’obédience républicaine ou de tendance démocrate. Ensuite, parce que parmi cette vaste production, nombreux
sont les films frontalement politiques, soit parce qu’ils expriment une vision politique, soit parce qu’ils observent le fonctionnement
du système politique américain.
au Sénat,
Monsieur Smith
de Frank Capra (1939)
Sans doute la “mère” des
films politiques américains, le
premier des grands classiques
hollywoodiens marquants qui a
scruté les arcanes de Washington.
On y suit le parcours d’un
monsieur Toutlemonde, honnête citoyen idéaliste
qui devient sénateur et se heurte aux manœuvres
des politiciens roués et aux intérêts cyniques des
lobbys financiers. Le discours-fleuve final de James
Stewart/Mr Smith est un morceau de bravoure. Si
la vision de Capra peut aujourd’hui sembler naïve,
il a ici touché une corde qui est plus ultrasensible
que jamais en 2016, celle du fossé (réel ou ressenti)
entre les citoyens ordinaires et les politiciens
professionnels.
La Cible parfaite,
de Jacques Tourneur (1958)
Un film méconnu de Tourneur
pourtant aussi beau et
passionnant que La Féline ou
Vaudou. Sur une intrigue de
polar et avec un budget de série
B, Tourneur évoque le rôle des
instituts de sondages, leurs
relations parfois consanguines avec les milieux
politiques, la possibilité d’enquêtes d’opinion
truquées visant à influencer les électeurs, le poids
des lobbys. Là encore, les questions soulevées
par ce film n’ont pas pris une ride quand on voit
que tous les sondages se sont plantés sur l’issue
du duel Trump-Clinton. Tourneur allie une critique
du système politique américain à la beauté sèche
caractéristique de son style.
Le président veut nommer un nouveau secrétaire
d’État aux affaires étrangères, mais l’homme qu’il
choisit ne bénéficie que d’une courte majorité au
Sénat et a aussi quelques adversaires dans son
propre camp, dont un rival qui l’accuse de sympathies
communistes. Radiographie précise et complexe
du fonctionnement de la politique américaine, des
rapports entre le législatif et l’exécutif, des rivalités
personnelles et des intrigues de couloir, le tout porté
par la mise en scène au scalpel de Preminger. Un
chef-d’œuvre qui n’a pas pris une ride.
ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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