Atypeek Mag N°1 Atypeek Mag N°1 - Octobre - Novembre - Décembre | Page 96
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ATYPEEK MAG #01
OCT./NOV./DEC. 2016
CULTURE MUSICALE
La révolution numérique
STEVE ALBINI
ENTRETIEN : Philippe Deschemin INFOS : www.freaksound.com/blog/stevealbini
Né au début des années 60 en Californie, Steve
Albini peut s’enorgueillir d’avoir contribué
à l’écriture dune partie de l’histoire de la
musique moderne.
Témoin de l apparition du mouvement punk acteur de la
scène indie américaine de la fin des années 80 - terreau
du tsunamigrunge -, spectateur et acteur d’une discipline
artistique qui s’avère aussi être une industrie, Steve Albini
a fondé et joué dans Big “Black, Rapeman et officie toujours
dans Shellac. Il aura également produit des centaines de
disques incontournables : du In Utero de ‘Nirvana, en passant
par des groupes tels que Neurosis ou Pixies. L’homme nous
livre sa vision de l’avant et après révolution numérique.
Nous sommes le 15 novembre 2014 à Melbourne, en Australie, lors de
la conférence Face the Music. Steve est invité à échanger autour des
problématiques liées à la révolution numérique dans l’industrie du
disque. Au cours de son intervention qui dure une heure, il aborde
toutes les facettes de l’industrie musicale, notamment ses évolutions et
les rapports de classes entre les différents acteurs : musiciens, labels,
producteurs, disquaires, radios, presse, etc. Il s’agit d’un témoignage
éclairé et éclairant.
Steve démarre son intervention assez simplement, histoire de poser
le contexte de son analyse. “J’ai 52 ans, j’ai toujours joué dans des
groupes, toujours été actif musicalement, d’une manière ou d’une autre,
depuis 1978. À ce jour, je joue encore, je travaille en tant qu’ingénieur
du son et je possède mon propre studio d’enregistrement à Chicago.
J’ai écrit pour un fanzine, j’ai été programmateur radio, organisateur de
concerts et j’ai également monté un petit label. Je n’ai pas forcément
réussi dans tout ce que j’ai entrepris, mais ces différentes activités sont
partie intégrante de mon CV J’ai enregistré près de deux mille disques
pour des groupes indépendants comme pour des rock stars, pour de
petits labels comme pour de plus gros. De fait, je pense avoir le profil
adéquat pour évaluer l’état de santé de la musique et comprendre
son évolution. “
Une fois les présentations faites, Steve Albini rentre dans le vif du sujet :
“J’entends dire que les temps sont durs, qu’internet a coupé les pattes
de l’industrie et que, bientôt, plus personne ne fera de la musique parce
qu’il n’y aura plus d’argent. Pratiquement partout, il existe une version
différente de cette perspective alarmante. Ceux qui avaient pris l’habitude
de tirer de bons revenus des ventes de disques ont vu la source se tarir et
ne s’en sortent plus, car ils ont toutes les difficultés possibles à évoluer
vers le téléchargement. De fait, ils supposent implicitement que cet argent
perdu doit être compensé et dépensent leur énergie à chercher de quelle
manière. J’aimerais que ce mécontentement cesse. “ À partir de là, Steve
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