Atypeek Mag N°1 Atypeek Mag N°1 - Octobre - Novembre - Décembre | Page 17
“Apportez du
whisky, du bois
à brûler et des
chansons”
Vancouver pour un spectacle similaire qui se nommait
Our Finest Hour, puis à Valladolid en Espagne où nous
avons fait une performance Demonomania, que l’on
trouve dans l’album A Good Night Out. Quelques uns des
morceaux en étaient le soundtrack. De ces performances
à grande échelle, les collaborations se sont développées.
Déjà sur l’album avec les mineurs, nous avons collaboré
avec Alan Sutcliffe qui faisait aussi partie du Ministry of Power. Il était venu à Paddington et Vancouver
avec nous. Puis nous avons fait une tournée avec des
danseurs et c’était la tournée Materia Prima/Terra Firma.
Ce que nous avions fait en Espagne avait introduit des
éléments de musique folk.
Paul Jamrozy : On peut regarder les choses sous
différents angles. D’abord, quand nous avions fait la
tournée des mineurs, nous avions invité des gens de
la communauté à se joindre à nous, à collaborer. Déjà
il y avait les joueurs de cornemuse. Nous avions fait
un concert à Bedford et un gars est venu vers nous, il
voulait jouer avec nous, il était joueur de cornemuse.
Il s’appelait Alistair Adams et par la suite il a rejoint le
groupe. Ce fut la première introduction des éléments
celtiques. Aussi Angus Farquhar avait sa compagnie
en Ecosse NVA et il avait toujours été intéressé par cet
angle écossais, celtique. Tout ce qui s’est passé dans
ce domaine vient en grande partie de son influence. À
Edinburgh, Angus a initié cet ancien rituel celtique le
Beltane Fire. C’était un festival païen à l’origine. L’église
l’a fait stopper à cause des connotations. Nous avons
commencé ce festival et le flyer disait : “Apportez du
whisky, du bois à brûler et des chansons”. Nous avons
commencé avec trente personnes sur le flanc des collines et aujourd’hui c’est un des événements les plus
importants du calendrier touristique d’Edinburgh. Nous
n’avons plus rien à voir avec ce rendez-vous annuel.
Après qu’on l’ait fait pendant dix ans, les personnes
impliquées ont créé la Beltane Society et en ont assuré
le management et aujourd’hui c’est devenu énorme. À
l’époque c’était dangereux, sauvage. Aujourd’hui il y a
des barrières de sécurité, une centaine de policiers, etc.
Mais ça reste très spectaculaire avec des centaines de
performeurs.
Paul Jamrozy : C’était
comme la dernière résistance
de cette culture face à une puissance plus grande. Ils périrent
mais en se battant. C’était la
défaite héroïque.
Graham Cunnington : Il y a des figures iconiques
comme l’Homme Vert ou l’Homme Rouge, comme le
Printemps du Feu. On boit du vin rouge dans de grandes
cornes, de grandes gourdes. Il y a ces danses sexuelles
assez obscènes et crues. À présent il y a des centaines
d’Hommes Rouges, et des Hommes Bleus ou Verts. La
May Queen est une figure centrale également. Les visages sont peints en blanc et noir, les vêtements aussi.
Au premier festival on devait être 200, à présent ils sont
10 000 chaque année.
Vous parliez d’un “art prolétaire” pour votre musique.
Qu’est-ce qu’il en reste
aujourd’hui ? Êtes-vous les
seuls à faire perdurer cette
tradition, ce qui explique que
vous soyez toujours là ?
Paul Jamrozy : C’était le début des rituels celtiques. À partir de là d’autres personnes ont été intéressées comme Brith Gof. On les intéressait sur le plan
politique mais aussi les connexions celtiques collaient à
la façon dont ils voyaient le projet.
Graham Cunnington : Le sujet de Gododdin nous
a été présenté par Brith Gof. C’était pertinent car il était
question de la mentalité de l’empire britannique et la
retourner sur elle-même. Dans l’album avec les mineurs,
l’ennemi venait de l’intérieur alors qu’avant il était extérieur. Gododdin a été fait au Pays de Galles, en Écosse,
pas en Angleterre.
Paul Jamrozy : Nous devions le faire en Bretagne.
Graham Cunnington : Nous l’avons fait à Frisland
en Hollande, une minorité au sein des Pays Bas. Ils ont
leur propre langue. On l’a fait aussi en Italie. La métaphore tournait autour de la marginalisation des cultures
minoritaires au sein de la Grande Bretagne.
Paul Jamrozy : C’était le plus vieux poème britannique qui est écrit en gallois.
Graham Cunnington : Le gallois est le plus proche
du vieil anglais.
Graham Cunnington : Il n’y
a pas beaucoup de gens qui font
de la musique - du moins au
Royaume Uni - qui soient riches.
Les jeunes qui y arrivent sont
les seuls avec les ressources. À
Londres il est très difficile d’avoir
un espace car l’immobilier coûte
si cher. À notre époque, on
pouvait aller dans un bâtiment
vide et répéter. Aujourd’hui il y a
très peu de lieux et personne n’a
le temps, car tout le monde doit
cumuler deux ou trois emplois.
Il semble que les groupes qui
percent aujourd’hui viennent
de portions plus riches de la
société, celles qui peuvent avoir
le temps et l’espace. Je parle
de groupes plus grand public.
Mais dans l’underground il doit
toujours rester ce côté prolétaire.
Sleaford Mods est vraiment
différent du reste en ce sens.
C’est une période étrange car
la moindre chose coûte si cher
maintenant.
ATYPEEK MAG #01
OCT./NOV./DEC. 2016
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