Lorum Ipsum
S’ évader
Rien ne m’ avait préparée à ma première rencontre avec le sous-continent. Un enchaînement d’ événements improbables m’ avait conduite à consulter Meghan Rose, astrologue basée à Los Angeles. Ses intuitions, troublantes de justesse, se sont conclues sur une vision: un voyage en solo. En tant que mère de trois enfants de moins de trois ans, cette idée me paraissait aussi surréaliste qu’ une nuit de sommeil ininterrompue. Et pourtant: j’ étais « appelée » à partir seule en Inde pour assister au Maha Kumbh Mela, le plus grand rassemblement humain sur Terre. 400 millions de personnes – une perspective cauchemardesque pour une claustrophobe. Mais la session avec Meghan s’ est avérée si juste que l’ idée a fait son chemin … Ce qu’ elle ne savait pas, c’ est que mes parents avaient prévu ce voyage depuis des mois: je pouvais donc me glisser dans leurs bagages, même si je ne percevais pas encore la dimension solitaire de ce voyage.
L’ aspect « solo » s’ est finalement très vite matérialisé. J’ ai réalisé que mes parents se rendaient à New Delhi, tandis que je prenais un vol pour … Mumbai. Seule.
À ma sortie de l’ aéroport, cernée par une végétation luxuriante, je m’ attendais à sentir l’ odeur fétide dont on m’ avait tant parlé – rien. Bien sûr, ça sentait la ville. Mais ce n’ était pas pire qu’ à New York. En revanche, la circulation était telle qu’ on me l’ avait décrite: un ballet chaotique où rickshaws, Range Rovers et kali-peelis( des taxis rétros noirs et jaunes) se frayaient dangereusement un chemin. La ville, pourtant très animée, était empreinte d’ une langueur inexplicable. Était-ce la chaleur, les enfants jouant au cricket dans les ruelles ou les gens bavardant autour de vendeurs de chai …? L’ exubérante Mumbai vibrait d’ une lumière dorée et enveloppante. C’ était donc ça, l’ Inde: un choc sensoriel, une explosion pour les sens, un chavirement de l’ âme. J’ étais conquise.
Après m’ être installée dans le boutiquehôtel The Kin – un bijou récemment ouvert –, j’ ai exploré le marché aux fleurs débordant de tagètes et de tubéreuses, mangé des dosa dans la rue, bu par accident de l’ eau du robinet( heureusement, sans grand effet), dormi huit bonnes heures … avant de préparer à vivre l’ expérience opposée.
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