ACTES FIAPA | Page 47

Et je remercie une troisième fois Olivier Drunat pour m ’ avoir demandé d ’ aborder ces questions .
Il y a une troisième situation qui est une situation classique et commune à toute situation sanitaire exceptionnelle : la limitation des thérapeutiques actives . Tout le monde sait qu ’ il y a la loi Claeys Leonetti , où on nous parle de personnes de confiance et de directives anticipées . Mais ayant vécu la canicule , je peux vous dire que la personne de confiance au mois d ’ août , les directives anticipées au mois d ’ août , ou plus exactement les conditions permettant l ’ application juste et stricte de la loi , ne sont absolument pas réunies , mais on a contacté quelques familles , qui , en vacances , nous ont dit qu ’ elles ne rentreraient que dans 15 jours , et que pendant ce temps-là il fallait se débrouiller .
Or c ’ est un vrai problème de l ’ urgentiste . Vous devez en 15 minutes , en 20 minutes , en une demiheure , parfois en 5 minutes , vous poser la question : est-ce-que ce patient , que vous ne connaissez pas et que vous n ’ avez pas vu 5 minutes auparavant , justifie ou non une limitation des thérapeutiques actives ? Jusqu ’ où on va ? Dans quel intérêt ? Sans avoir la moindre directive anticipée , personne de confiance ou autre . C ’ est un vrai problème . Il y a déjà des problèmes d ’ identitovigilance dans les situations sanitaires exceptionnelles . Mais même si on a la bonne identité , il n ’ est pas certain qu ’ on puisse être amené à appliquer de façon rigoureuse , stricte et honnête , la loi . Donc on voit bien que la question éthique est épineuse . On peut toujours se dire qu ’ en situation d ’ urgence absolue , la nécessité fait force de loi , et qu ’ on s ’ organise comme on peut .
Cela , on peut le comprendre . Mais on est dans des situations qui sont après l ’ urgence absolue , qui sont à J2 , J3 , J4 , et qui se posent quand même , c ’ est-à-dire la capacité de la nation et du système sanitaire à apporter des soins pour tout le monde . Et à partir du moment où il faut faire des choix , il y a le problème éthique qui se pose , et je n ’ ai pas les réponses .
Bien évidemment il y a d ’ autres spécificités dans les situations d ’ urgence . La première c ’ est évidemment les prises en charge psychologiques . Dans notre Plan Blanc d ’ établissement des urgences , nous avons des infirmiers psychologues , nous avons un service de psychiatrie , on a un psychiatre de garde présent sur place 24 heures sur 24 ce qui ne pose pas de problème . Il a la nécessité de prendre en charge , non pas les syndromes de stress post- traumatiques mais surtout les états de stress aigus qu ’ on verra aux urgences . Le vrai problème , c ’ est la spécificité de la personne âgée .
Et aujourd ’ hui , dans mon expérience , il y a quand même deux notions qui s ’ affrontent et qui pourraient être démarquées par la ligne de la Seine entre le Nord et le Sud , puisque j ’ ai exercé et au Nord de la Seine et au Sud de la Seine , où certains considèrent que la psychiatrie c ’ est toute la psychiatrie , si je peux me permettre , de 7 à 77 ans voire plus . Et d ’ autres qui considèrent que , passé un certain âge , il n ’ y a plus de psychiatrie , il y a plutôt de la psycho- gériatrie , et que , avant de savoir si c ’ est de la psychiatrie , il faut se poser la question de la démence .
Or , à situation sanitaire exceptionnelle identique , je ne vois pas pourquoi les personnes âgées ne feraient pas un état de stress aigu qui pourrait bénéficier du professionnalisme de psychiatres . Nous avons une psychologue clinicienne qui s ’ occupe des stress post-traumatiques mais qui , à mon sens , n ’ est absolument pas formée à la personne âgée et à sa spécificité . C ’ est-àdire qu ’ elle a l ’ habitude de voir des personnes qui développent un syndrome anxieux après une agression ou un traumatisme et ils ont entre 20 et 50 ans . Et donc il y a un vrai problème de compétences et un vrai problème de domaines de compétences avec certains psychiatres ou certaines écoles de pensées psychiatriques qui considèrent que la psycho-gériatrie c ’ est plus de la gériatrie que de la psychiatrie . Ce qui pose aussi la troisième chose qui est la mise en commun des moyens sur un plan territorial . Autrement dit , la question est de dire : est-ce qu ’ Olivier DRUNAT , psycho-gériatre , veut bien s ’ intégrer dans le Plan Blanc et que je puisse l ’ appeler à 3 heures du matin pour une situation sanitaire exceptionnelle , de façon plus sérieuse , c ’ est-à-dire la mise en commun des moyens pour permettre une prise en charge adaptée ? Et aujourd ’ hui , force est de constater , que les personnels chargés des prises en charge psychologique ou psychiatrique dans les services d ’ urgence ne sont peu , ou pas , formés à la spécificité de la personne âgée . Et ça , ça pose également d ’ autres questions .
On a , bien évidemment , la prise en charge sociale . J ’ ai découvert qu ’ effectivement , beaucoup d ’ articles décrivaient l ’ émergence de syndromes , de démence plus exactement , au décours de catastrophes naturelles et qui était liée , non pas forcément à un syndrome dépressif ou à un état de stress aigu , mais surtout à la perte des repères et notamment de l ’ habitat ou de l ’ environnement habituel des patients . Autrement dit , on peut penser que la prise en charge sociale , puisque nous avons également une assistante sociale ou deux assistantes sociales pour un service social
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