Acte de colloque : La pierre, un choix sociétal | Page 59

Ressources les pierres du Sanitas dans les dimensions dans lesquelles elles nous sont données . J ’ ai voulu , peut-être naïvement , les redécouper . Dans ce cas , tous les prix que mes économistes me présentaient — alors que j ’ allais chercher les pierres pas très loin , à Châtellerault , dans les carrières que je connaissais déjà — étaient systématiquement plus élevés avec ce réemploi . Ma question est : comment nous , architectes et maîtres d ’ œuvre , devons-nous acquérir cette culture du réemploi pour , non pas dessiner d ’ abord nos appareillages puis voir ce que l ’ on peut faire rentrer dedans , mais plutôt avoir tout de suite les dimensions préalables dans vos catalogues et concevoir nos dessins en fonction de ces pierres ? La redécoupe nous amène à des prix très élevés . constructifs sur des bâtiments des années 60 et on sait beaucoup mieux comment on va s ’ y prendre pour gérer la question des coûts . Enfin , l ’ approche que je conseillerais d ’ avoir quand on commence est de bien s ’ équiper des compétences mais aussi de ne pas viser des économies , parce que ce n ’ est pas la bonne porte d ’ entrée . Viser des coûts à l ’ équilibre en le faisant intelligemment pour y arriver et faire ensuite des bénéfices sur le plan environnemental et social nous semble être le plus grand intérêt de ces démarches .
M . Aubertin .
Christophe Aubertin , architecte .
M . Topalov .
C ’ est une bonne question que l ’ on s ’ est posée très tôt . Souvent , le coût embarqué dans un matériau de réemploi provient de la phase de préparation , qui peut contenir beaucoup d ’ étapes qui consistent à agir sur le matériau , le couper , le nettoyer , le surfacer , etc . Pour répondre à votre question , l ’ une des pistes est que le concepteur reconnecte un peu plus avec les questions très praticopratiques et matérielles des matériaux qu ’ il va manipuler et des techniques qu ’ il va utiliser pour les préparer et les remettre en œuvre . Le plus simple est d ’ aller travailler directement main dans la main avec les artisans et les gens qui font . C ’ est pourquoi je pense que ce colloque est éminemment pertinent sur cette question .
C ’ est grâce à l ’ entreprise qui est venue faire les tests de démontage , spécialisée dans la taille de pierre , que l ’ on a tout de suite eu la puce à l ’ oreille de ne pas proposer de découpe de ces pierres , parce qu ’ on savait que le coût de préparation allait être dans les traits de scie , c ’ est-à-dire une scie diamantée circulaire avec laquelle on coupe les pierres , qui s ’ use beaucoup et qu ’ il faut changer régulièrement . Le parti pris que l ’ on avait au début était que moins il y aurait d ’ interventions sur le matériau , mieux on s ’ en sortirait de tous les points de vue . Les inconvénients sont qu ’ il faut garder des faces « sales » avec des traces de polochon de colle , des traces d ’ usure sur les façades sudouest où le soleil et la pluie battante avaient travaillé la pierre et l ’ avaient noircie . On s ’ est accommodé de cela , alors que si l ’ on avait taillé la pierre , on aurait eu une surface propre , sciée , mais cela ne fonctionnait pas économiquement . Le deuxième élément de réponse est le côté expérimental de la démarche qui nous amène à un constat simple : la première fois que l ’ on fait un projet , on tâtonne , on teste des choses , donc cela prend du temps , on fait des erreurs et cela augmente parfois les coûts . En revanche , la fois suivante , une fois que l ’ on a de l ’ expérience … C ’ est le cas à la ZAC Python , dans le 20 e arrondissement , où l ’ on a les mêmes modes
Merci pour la présentation . Cela m ’ interroge sur la déconstruction des bâtiments en béton . Aujourd ’ hui , la quantité de bâtiments en béton est énorme . On déconstruit , on démolit , on concasse , cela prend énormément d ’ énergie , on sépare les aciers et on fait des petits granulats pour faire du remblai . Pourquoi ne va-t-on pas découper des blocs de béton unitaires , en quantité énorme , que l ’ on peut ensuite réemployer pour faire de la maçonnerie et empiler , qui convoqueraient tout le savoir-faire des constructeurs de la pierre sur la manière de rassembler ces blocs de béton ? Ils ont le défaut d ’ être assez fins , mais on pourrait aussi les renverser et construire avec une matière très stable que l ’ on connaît et que l ’ on sait mesurer .
M . Topalov .
C ’ est une belle boîte de Pandore qui est ouverte . Merci pour la question .
Je donne un cours d ’ une journée à mes étudiants sur la question du réemploi du béton , qui n ’ est pas si nouvelle que cela . Je peux vous renvoyer aux travaux d ’ une chercheuse de l ’ EPFL qui s ’ appelle Célia Küpfer , qui a fait une analyse incroyable de recensement de toutes les opérations de réemploi de béton qui ont eu lieu depuis les années 60 en Europe . Près de 80 projets sont étudiés et c ’ est fascinant . Pour vous parler de Bellastock , en 2016 , on a commencé à s ’ intéresser à cette question du réemploi du béton , notamment à Stains où l ’ on a fait des réalisations dans lesquelles on est allé scier des panneaux en béton dans des murs de refend , souvent des grands ensembles des années 60 et 70 , qui sont beaucoup démolis aujourd ’ hui , pour en faire des matériaux de construction . Quand vous êtes dans le contexte du NPNRU et que vous avez des espaces extérieurs à aménager , cela s ’ y prête assez bien parce que les voiles de béton s ’ y prêtent , en tant que voiles de béton au sol , de manière assez simple , même si ce n ’ est pas aussi simple . Plusieurs étudiants ont fait des mémoires sur la relation entre le réemploi de béton et le
59 COLLOQUE - LA PIERRE , UN CHOIX SOCIÉTAL