Vos Projets magazine N° 3 Vos Projets N3 | Page 23
Entretien Lysiane Fayolle,
Photos Eric Fayolle
Ben, l’artiste aux multiples talents, vit sur les hauteurs
de Nice depuis 40 ans. Sa maison, aux mille objets et
textes peints sur des plaques accrochées aux murs, est
digne du “Palais Idéal” du facteur Cheval. Il accumule
et ne jette rien et au bout de tant d’années, il s’est forgé
un paradis qu’il a du mal à quitter même pour quelques
jours. Avec son accent chantant et rocailleux il a accepté
gentillement de répondre à quelques questions sur son
étonnante maison.
en, pseudonyme de Benjamin Vautier, né le 18 juillet
1935 à Naples en Italie, est un artiste français d'origine
suisse.Il acquiert la notoriété auprès du public dès la
fin des années 1960, notamment à travers ses
“écritures” et aphorismes déclinés sous divers supports et
formes. Faisant partie de l'avant-garde artistique post-
moderne, Ben est l'un des principaux fondateurs du groupe
Fluxus et proche du lettrisme. Il est un artiste reconnu pour
ses performances, installations et écritures.
B
Quelle est l’histoire de cette maison ?
Mon épouse et moi avons acheté cette maison il y a 30 ou 40 ans.
Elle était très abimée, on ne pouvait pas faire autre chose que la
raser. Plusieurs familles avaient habité là autrefois et le bâtiment
avait été transformé au fur et à mesure que les générations
s’étaient agrandies, parfois un peu en dépit du bon sens. Après
son acquisition, j’ai commencé à la décorer à ma façon car j’ai une
maladie : je ne peux rien jeter. Plutôt que de me débarasser de
quelque chose, je le cloue au mur. Tous mes tableaux sont au
plafond. Depuis Marcel Duchamp, artiste du “Ready made” où
l'œuvre est signalée et finalement constituée par sa seule présen-
tation, je ne jette rien et je pense que “tout est beau”. Par
exemple, j’ai un amour pour les bidets et les W-C : je les remplis
de terre et je mets des cactus dedans. J’aime aussi beaucoup les
baignoires ; quand j’en trouve une sur le bord de la route, je m’arrête
et je l’emporte.
comme les autres, de dire les mêmes mots que tout le monde. Il
faut ne pas avoir peur de soi-même. La liberté, ça compte.
On peut constater que les mots vous encerclent ?
Il y en a des tas, j’en ai partout. Je ne m’en rappelle plus toujours,
j’aime bien écrire et je pense que certaines appellations sont
chargés de sens. “Chacun sa vie, chacun ses mots”. “Silence”,
c’est un beau mot.
Vous les avez mis au fur et à mesure ou est-ce le hasard ?
Cela dépend. Quand on m’a commandé un mur à Blois, il me
restait des plaques, alors je les ai accrochées sur ma maison. En
général, pour une commande, j’en demande deux ou trois de plus.
J’avais trouvé ce banc, j’ai mis un panneau “Le banc des accusés”,
c’est rigolo…
Est-ce que ce sont