SOCIETE
INGRID LABALLE & TEDDY ISIMAT-MIRIN
Deux professionnels aux services de la mode Guadeloupéenne
Ingrid Laballe et Teddy Isimat-Mirin ont une
passion commune pour le milieu artistique,
une réussite qui fait des émules en Guadeloupe depuis de nombreuses années. De
plus en plus prégnant dans le champs de
l’innovation, tous deux s’ingénient à développer des initiatives pertinentes tant dans
le cinéma que dans la musique et dans la
mode. La mode Guadeloupéenne mais
aussi Caribéenne, riche de ses traditions,
mais surtout, tourner dans la continuité
d’une mode plus contemporaine. Ils insufflent là une vraie mutation culturelle, consolider par des échanges, des rencontres
de professionnels tant régionales qu’internationales.
Ingrid Laballe présentez aux lecteurs de
“Tropics Magazine”?
Nous d irigeons une agence conseil spécialisée en management et conseil en industries créatives. Notre spécialisation est donc
le conseil et l’assistance autour des secteurs
artistiques traditionnels comme la musique,
la mode, le cinéma ou d’autres champs
émergents comme le tourisme culturel, les
médias ou les arts de la table. Nous sommes implantés en Guadeloupe mais nous
intervenons sur la totalité des marchés de
la Caraïbe. Cette activité s’appuie sur près
de 15 ans d’expérience et des réseaux de
premier rang, à la fois régionaux, nationaux
et internationaux. Mais notre leitmotiv est
le développement de produits et services
créatifs compétitifs à partir de la Caraïbe.
D’où vous vient ce goût immodéré pour la
mode?
Il s’agit en fait d’une passion commune à
partir de laquelle nous avons développé
une véritable expertise économique au fil
des initiatives. Il est reconnu que la mode
est un formidable reflet de la société. De ce
point de vue, la Caraïbe est passionnante
et encore riche d’histoires à conter.
Depuis 1995, nous avons mené de nombreuses actions autour de tous les acteurs
de la mode dans la Caraïbe: les marques,
les salons, les agences de mannequins, les
médias, etc. Au final, notre agence a réussi
à bâtir une fine expertise des marchés de
la Caraïbe Cette expérience est reconnue
puisque Teddy a été le premier professionnel de la Caraïbe à intégrer le cursus
du MBA en Global Fashion Management
dispensé par l’Institut français de la Mode
(IFM) à Paris.
Nous avons dès lors engagé une véritable
stratégie, à la fois régionale et internationale, mobilisant l’ensemble des pays de
la zone. Mais nous développons le même
degré d’expertise sur tous nos domaines
d’intervention.
Parlez nous plus amplement de cet espace
de commercialisation qu’est le KOD?
KOD est le 1er concept-store dédié à
l’univers de la mode de la Caraïbe, à
travers une fine sélection en habillements
et accessoires et autres articles de design. Nous l’avons donc conçu comme
un écrin au cœur de la ville de Pointe-àPitre. C’est un projet que nous avons expérimenté durant près de 4 ans jusqu’en
2012. Il illustre notre réflexion sur les besoins
en matière de distribution pour l’offre de
la Caraïbe qui peine à trouver son propre
modèle de distribution.
Les premiers résultats ont été particulièrement encourageants puisque nous
avons réussi à fédérer un nouveau profil
de clientèle et tester un grand nombre
de marques régionales. L’espace KOD
organisait régulièrement des évènements
et rencontres entre créateurs caribéens
et clientèles.
Aujourd’hui, notre clientèle nous réclame
régulièrement la réouverture de cet espace. L’aventure devrait donc être relancée prochainement autour d’une offre
revisitée et d’une équipe nouvelle.
Les KFD mettent en relief le meilleur de la
mode de la Caraïbe, parlez nous plus amplement de cette belle aventure?
Le forum Kréyol Fashion Days (KFD) est un
projet conçu par notre agence, et piloté
par la Région Guadeloupe , chef de file,
dans le cadre du dispositif européen de
coopération INTERREG IV. Il s’agit d’un forum professionnel consacré au secteur de
la mode et du design en Caraïbe autour
d’un riche programme de conférences,
ateliers, entretiens individuels et expositions
diverses.
L’aventure KFD est née du constat que notre offre était particulièrement créative mais
que nos sociétés et marques manquaient
encore de structuration. En complément
des principales fashion weeks dans la région, les KFD permettent de travailler à la
dimension économique et technique de
notre offre dans l’environnement mondial.
Programmée de manière biennale, l’édition inaugurale s’est tenue en 2012 sous
le parrainage exceptionnel du créateur
Français Jean-Paul Gaultier, et nous avons
eu l’honneur d’accueillir le Brésil comme
invité spécial de la seconde édition des
KFD en Juin 2015. A l’issue de ces deux
premières éditions, le forum KFD est déjà
positionné dans certains circuits professionnels internationaux et nous envisageons
de belles évolutions en lien avec nos divers
partenaires.
Les créateurs des Antilles souffrent du
manque d’exposition et du désir des antillais d’acheter chez eux, préférant faire des
emplettes en France, Miami ou autre, qu’en
pensez-vous?
C’est une situation qui affecte effectivement de nombreux créateurs antillais. C’est
l’illustration d’une compétitivité parfois insuffisante et de la nécessité de consolider
les univers de marque, la notoriété et la
qualité de l’offre globale proposée par ces
créateurs. Il ne faut pas oublier que la concurrence est désormais mondiale et nous
avons obligation d’être compétitifs sur
des segments choisis.
La disparition progressive des boutiques
multi-marques face aux enseignes internationales a aussi beaucoup pénalisé
la visibilité commerciale des créateurs
indépendants. Au delà du produit, nos
marques doivent aussi être plus performantes dans une interaction accrue
avec les consommateurs, en proposant plus de sens autour de l’offre.
C’est aujourd’hui le seul moyen de
séduire et fidéliser les consommateurs actuels. Des solutions existent en
matière de formation et d’accompagnement des entreprises A ce
sujet, nous travaillons autour de
nouvelles générations de
créateurs dans le cadre
d’un programme d’accompagnement d’entreprises créatives de
Guadeloupe dénommé
EMERGENCE, co-financé
par l’Etat, la Région Guadeloupe et l’Europe. Un
créateur comme Jean
Marc BENOIT illustre la
nouvelle génération de
créateurs qui intègre
ces enjeux.
encore calques sur le modèle du couturier autour d’éléments de tradition. En face,
beaucoup de jeunes créatifs arrivent aujourd’hui avec une culture plus contemporaine et une volonté de revisiter et réinterpréter cette tradition.
La reconnaissance des professionnels est
croissante En dépit d’un rythme parfois lent,
il convient de reconnaître que les march és
se structurent Toutefois, si on considère des
dispositifs d’accompagnement comme
Emergence, des offres de formation comme Nomad Caraïbes, il est permis d’augurer de bons développements
Quels sont les créateurs de mode qui vous
font rêver?
Nous avons une sensibilité particulière
pour les créatifs à dimension humaine. Au
niveau international, des créateurs comme
Karl Lagerfield, Jean-Paul Gaultier ou Dries
Van Noten nous Dans la Caraïbe, Robert
Young de la marque The Cloth (Trinidad
& Tobago) ou Jean Marc Benoit (Guadeloupe). Nous avons un oeil attentif sur l’explosion de la création sur le continent Africain, et en Amérique Latine.
Un mot à l’endroit des lecteurs de « Tropics
Magazine »?
Préparez-vous à découvrir et à suivre une
nouvelle offre de marques caribéennes
émergentes qui ne manqueront pas de
vous surprendre.
Entretien de TROPICS MAGAZINE par Karine
Linord.
Comment se porte la
Mode en Guadeloupe
et quel avenir pour une
mode plus productive
et connue hors de notre frontières?
Nous estimons que
le mode en Guadeloupe et aux Antilles
est dans une étape
intermédiaire entre 2
générations. Les anciens créateurs sont
page 80 | Issue #59