ToutMa ToutMa n°51 - Septembre / octobre 2018 | Page 14

portrait

ART
ENTRETIEN _ Linda MESTAOUI

Philippe ÉCHAROUX le street art humaniste

Marseille est son laboratoire créatif , son terrain de jeu , sa base . C ’ est ici que Philippe Écharoux est né , qu ’ il a grandi , qu ’ il s ’ est construit , qu ’ il a relevé ses premiers défis . C ’ est à Marseille encore qu ’ il a décidé d ’ écouter son cœur et de donner une chance à la photographie . Puis lui est venue l ’ idée ingénieuse d ’ appréhender le street art sous un angle nouveau : en projetant des messages humanistes , engagés et poétiques dans le monde entier . Notre préféré ? « Estce que l ’ enfant que tu étais serait fier de l ’ adulte que tu es devenu ? » Entretien .
Painting With Lights - Marseille
Painting With Lights - Amazonie
A World First in New york
ToutMa : Peux-tu te présenter , en quelques lignes ?
Philippe Écharoux : Je suis né à Marseille en 1983 . J ’ ai grandi dans le quartier de la Croix-Rouge , dans le 13 e arrondissement . J ’ ai commencé à sortir des sentiers battus grâce à l ’ escalade . Ce sport m ’ a beaucoup aidé à me construire et m ’ a énormément sensibilisé au respect de l ’ environnement . J ’ ai ensuite fait partie des premiers kitesurfeurs de la ville . À l ’ époque ce sport en était encore à ses balbutiements et il fallait être un peu inconscient , faire preuve d ’ improvisation , pour pouvoir le pratiquer . J ’ ai , là aussi , beaucoup appris et toutes ces expériences et chemins de traverse m ’ ont aidé à construire ma carrière artistique . Je suis quelqu ’ un de curieux et j ’ ai vraiment commencé la photographie , complètement par hasard , l ’ année où j ’ ai débuté ma formation de travailleur social . Je suis allé au bout de ma formation d ’ éducateur spécialisé tout en me passionnant pour la photo . Et j ’ ai finalement opté pour cette dernière . Aujourd ’ hui je suis un photographe portraitiste et street artiste . Quand je regarde en arrière je me rends compte que ce n ’ est pas par hasard si je fais du portrait et de l ’ art dans les rues ou la nature .
TM : Tu es très attaché à Marseille , qu ’ est-ce qui te plaît dans cette ville ? Cela reste ton point d ’ ancrage malgré tes nombreux voyages à travers le monde .
PE : Marseille c ’ est chez moi , j ’ ai grandi ici et je tiens à ce que notre ville reste ma base . Elle a toujours été un laboratoire pour moi , aussi bien à l ’ époque des sports extrêmes pratiqués en pleine nature qu ’ à l ’ époque de mes expérimentations artistiques . Marseille est un melting pot , un brassage de communautés et , quand tu grandis ici , ça te rend ouvert d ’ esprit . Ici tu n ’ as pas peur de l ’ autre . Cette ambiance , le caractère si particulier de notre ville contribuent forcément à la création de la carrière d ’ un artiste . Je suis aujourd ’ hui un des ambassadeurs de la ville et c ’ est ma plus grande fierté !
Mon credo c ’ est d ’ inspirer les gens à se lancer dans ce qu ’ ils aiment vraiment , de se libérer des obligations qu ’ ils se créent . Si je peux inspirer des minots , pour moi , c ’ est gagné !
TM : Ta dernière intervention artistique à New York ( projections lumineuses des visages de New-Yorkais sur les arbres de Central Park ) s ’ inscrit dans la continuité même de ta démarche de sensibilisation à la cause environnementale en Amazonie , n ’ est-ce pas ?
PE : Il y avait deux objectifs principaux dans mon projet new-yorkais . Le premier était de mettre en avant un contraste après le projet amazonien . À New York , ce n ’ est pas la nature qui entoure les gens , ce sont les gens qui essaient d ’ entourer la nature . La nature à Central Park est bien définie dans un rectangle , alors j ’ ai pensé que c ’ était un bon endroit pour éclairer cette réflexion . Qui entoure qui ? Vous avez déjà la réponse , non ? Alors que parfois nous avons l ’ illusion que c ’ est nous qui dominons la nature . La deuxième raison était plus basique . J ’ aime le défi et j ’ aime réaliser des projets qui n ’ ont pas été faits auparavant . Créer quelque chose d ’ inédit à New York était un défi auquel je voulais faire face !
TM : Parle-nous des installations spécifiques que tu as faites à Marseille depuis le début de ta carrière , c ’ est là qu ’ est né le « street art 2.0 » ?
PE : J ’ ai lancé cette forme d ’ art urbain que la presse a nommée « street art 2.0 » en 2014 , en faisant réapparaître ( projection lumineuse via un rétroprojecteur ) le portrait de notre Zizou national sur son mur de la Corniche Kennedy . Ce lancement a été vu dans plus de 57 pays , je n ’ en reviens toujours pas . J ’ ai fait énormément d ’ expérimentations dans différents lieux de la ville . En 2016 , j ’ ai eu la chance de pouvoir faire une exposition d ’ une semaine avec le Vieux-Port tout entier comme galerie , c ’ était un vrai rêve !
Septembre / Octobre 2018 _ TM n ° 51 12
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