ToutMa ToutMa n°46 - Septembre / Octobre 2017 | Page 14

talent

PORTRAIT
TEXTE _ Jacques LUCCHESI

GILMAS ou la tentation de New York

Né à Marseille où il a passé sa prime jeunesse avant d ’ aller étudier la philosophie à Paris , Gilles Moumas - alias Gilmas - aurait pu , comme bien d ’ autres , se satisfaire d ’ une confortable situation d ’ enseignant et cultiver parallèlement son goût pour la musique . Mais il faut croire que ce clivage existentiel lui était insupportable puisqu ’ en 2013 , ce fringant quadragénaire
a choisi de s ’ expatrier à New York - ville qu ’ il adore - pour vivre pleinement ( de ) sa passion . Depuis , il écrit , compose et chante dans des clubs comme un véritable professionnel . A la veille de sortir un nouvel album , cet auteur-compositeur doué et prolifique - plus de deux cents chansons à son actif - a bien voulu nous éclairer sur son parcours atypique .
ToutMa : Comment la musique s ’ est-elle imposée dans ta vie , au point de vouloir devenir chanteur dans le contexte social actuel ?
Gilmas : Tu as employé le bon terme : imposée . La musique est une passion , une vocation , donc littéralement un « appel ». Il est risqué , voire déraisonnable d ’ y céder mais le refuser est plus douloureux encore . Changer de vie m ’ est apparu comme une nécessité intérieure . Quant au contexte actuel , il est en effet difficile . Heureusement , un nouveau modèle économique se met en place aujourd ’ hui : le streaming . La plupart des fans de musique souscrivent un abonnement auprès d ’ une plateforme de streaming , comme Spotify , Deezer ou Apple Music . Les artistes sont rémunérés par un pourcentage sur le nombre d ’ écoutes . Le numérique a juste transposé la logique ancienne du disque . Ceci dit , être chanteur n ’ a jamais été , pour moi , le produit d ’ un calcul . Plus qu ’ être chanteur , ce qui me passionne , c ’ est d ’ être un musicien , un créateur . J ’ adore concevoir un projet de A à Z , partir d ’ une intuition - ou d ’ une inspiration - et la faire grandir peu à peu jusqu ’ au produit fini . Je joue de différents instruments ( piano , basse , guitare , percussions ). J ’ ai mon studio personnel , j ’ écris , compose , arrange , mixe . J ’ ai toujours été fasciné par la figure de l ’ artiste total , de l ’ homme-orchestre façon Prince . J ’ y retrouve , au fond , ce avec quoi je pensais avoir rompu en arrêtant la philosophie : l ’ amour du système et le désir de maîtrise . Comme quoi !
TM : Pourquoi le choix de New York comme lieu de vie et de travail ? Qu ’ as-tu trouvé là-bas que tu ne pouvais avoir en France ?
G : Je suis venu à NY pour la première fois comme touriste , il y a 4 ans . J ’ ai eu un coup de coeur pour cette ville sur laquelle , enfant , je rêvais et écrivais des poèmes . L ’ énergie de cette ville et l ’ optimisme des américains contrastent avec la mélancolie française . Louis-Ferdinand Céline a écrit que « New York est une ville debout ». Je dirais que c ’ est une ville au travail , un maelstrom perpétuel . L ’ esprit de compétition se marie avec un esprit d ’ ouverture et une vraie chaleur humaine des New-yorkais : quel contraste avec la froideur des Parisiens ! C ’ est le New York state of mind que chante Billy Joel par exemple . Pour moi , c ’ est plus une différence de mentalité , un sentiment que tout est possible , qu ’ une opportunité professionnelle précise . Réussir dans la musique est difficile , ici comme ailleurs . Mais il y a peut-être moins de népotisme et de copinage . Si quelqu ’ un pense pouvoir faire des affaires avec vous , il vous donnera votre chance , qui que vous soyez . À voir , donc !
TM : Quelle est la coloration musicale de ton dernier album ? Comment tu le situes dans ta carrière et qu ’ en espères-tu ? Enfin , comment le public français peut-il se le procurer ?
G : Je dirais que c ’ est de la pop music ( guitares acoustiques , basse , mandoline ) avec des influences électro , notamment par l ’ usage des loops , dans les rythmiques par exemple - comme dans Out Of Manhattan . Je trouve ce métissage intéressant . Il y a aussi une dimension cinématique , comme dans Amor Fati ou Rise In Love , avec des cordes et des chœurs . J ’ aime que la musique soit comme la bande-son d ’ un film que se crée l ’ auditeur . C ’ est mon troisième album et le premier à New York . Il est nourri de ma vie ici et de mes expériences en tous genres . J ’ en attends à la fois tout et rien de précis . Mes chansons sont comme mes enfants : elles vont vivre leur vie propre . Je les ai mises au monde mais je ne sais pas ce qu ’ il va leur arriver . Je souhaite seulement qu ’ un grand nombre de personnes les aiment et se retrouvent en elles . L ’ album s ’ intitulera New York Snapshots et sera disponible dès la deuxième quinzaine de septembre sur les principaux sites de streaming ( Deezer , Spotify , Apple Music , etc .), ainsi que sur mon site gilmasmusic . com .
Septembre / Octobre 2017 _ TM n ° 46 12
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