agenda
L’EXPO
TEXTE _Romain BONY-CISTERNES
Harry
CALLAHAN
entre ombre
et lumière
Harry Callahan, le plus français des Américains ? L’on savait déjà
la fascination que la France, en général, et le Sud, en particu-
lier, ont toujours exercée sur nos amis d’outre-Atlantique. L’exposi-
tion Harry Callahan au musée Granet d’Aix-en-Provence nous en
donne une illustration supplémentaire. En s’associant à la Maison
D
ans le sillage d’une exposition présentée à Paris en
2016-2017, Aix est cette fois doublement mise à l’hon-
neur, du 16 mars au 21 juillet, avec ces « Archives françaises »
enfin réunies et dévoilées. Car à y regarder de plus près,
cette rétrospective photographique nous présente la capitale
historique de la Provence sous un angle lumineux que nous
ne lui connaissons plus guère : une ville vidée de ses habitants
dans laquelle un jeu d’ombre et de lumière peut, sans être
gêné par les badauds, prendre place.
européenne de la photographie, le musée nous présente 90 cli-
chés de la période aixoise de l’artiste, lui qui a séjourné à Aix entre
1957 et 1958, au cours d’un congé sabbatique qui lui avait été
accordé par l’Institut de design de Chicago.
ment de rues anciennes. La capacité de la lumière à percer,
parfois de manière inattendue, cet entrelacs de constructions
constitue incontestablement le cœur de cette exposition.
L
a campagne n’est, quant à elle, pas en reste, puisque,
logé sur un chemin menant à la Sainte-Victoire, le pho-
tographe, sidéré de la présence d’un tel relief, absent de ses
plaines natales, en saisit tous les contrastes, à rebours des
habituels panoramas.
J
eu de lumière parce que le photographe cherche à resti-
tuer de manière brute, en captant les rayons du soleil, les
façades remarquables des rues aixoises, pavées et sinueuses,
où l’on trouve refuge l’été, à l’ombre d’une placette ou
d’une pergola, pour fuir la chaleur écrasante. Jeu d’ombre
car la nuit a également constitué une source d’inspiration
pour ce photographe fasciné par un cours Mirabeau suspen-
du dans le temps, plongé dans l’obscurité la plus totale et
simplement baigné des faibles lueurs dégagées par quelques
points luminescents.
L
e parcours de ce Nord-Américain qui, avant de s’établir
presque par hasard en Provence, n’avait jamais quitté le
Midwest, ne pouvait que provoquer une véritable fascina-
tion née de la rencontre avec une contrée lointaine. Aussi, le
dépaysement de l’artiste transparaît-il très nettement dans
l’exposition : on a l’impression de partager, avec lui, son
étonnement à chaque cliché. Or, cette fascination ne porte,
contre toute attente, aucunement sur le patrimoine archi-
tectural aixois (que l’on sait pourtant riche), mais plutôt sur
l’organisation de la ville. On dirait presque sur la « planifica-
tion urbaine ». Habitué aux vastes étendues de plaines et aux
villes neuves, tracées selon une logique géométrique impla-
cable, Callahan ne pouvait qu’être interloqué par l’entasse-
Avril / Mai 2019 _TM n°54
L
e musée Granet nous offre une occasion intéressante
de porter un regard neuf, renouvelé, sur ces paysages
qui nous sont si familiers que l’on tend à ne plus les remar-
quer ou du moins à ne plus les apprécier à leur juste valeur.
En cherchant à retranscrire l’atmosphère des villes et cam-
pagnes de la région aixoise des années 1950, Callahan nous
éloigne des clichés habituels sur la somptuosité des bâtiments
et des paysages. Il n’est certes pas un Cézanne, mais il peut,
tout autant que ce dernier, se targuer d’avoir, d’une certaine
manière, mis en valeur notre région.
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Jusqu’au 21 juillet au MUSÉE GRANET
place Saint-Jean de Malte,
Aix-en-Provence
_www.museegranet-aixenprovence.fr
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