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VOS STARS
ENTRETIEN _ Emmanuelle VIGNE PHOTO EN UNE _ Philippe QUAISSE PHOTO DU FILM _ Carole BETHUEL
&
Valérie MÜLLER Angelin PRELJOCAJ
MÈNENT LA DANSE
Couple à la ville , la réalisatrice et le chorégraphe signent ici leur première réalisation commune . A travers l ’ histoire de Polina – danseuse classique promise au Bolchoï basculant vers un autre destin - Valérie Müller par l ’ écriture , et Angelin Preljocaj avec la danse , apportent au récit force émotionnelle et universalité . Ici , la vie entre dans la danse . Au-delà de l ’ histoire , le film révèle des acteurs dans la danse , et des danseurs dans le jeu . Moments de grâce et d ’ émotion au rendez-vous …
ToutMa : Quels éléments narratifs vous ont tant séduits dans la BD de Bastien Vivès pour vous décider à l ’ adapter au cinéma ?
Valérie Müller : Bastien Vivès a su traduire la vie réelle de jeunes danseurs qui se côtoient , échangent et font la fête . Nous ne sommes pas dans les stéréotypes de la danseuse , un peu hystérique , souvent anorexique , victime de rivalités . Pour une fois , il est question d ’ un monde de jeunes passionnés , qui travaillent beaucoup mais profitent de la vie .
Angelin Preljocaj : Ce qui m ’ intéressait c ’ était le parcours . Comment les fragilités d ’ un individu peuvent au final être les ressorts de sa créativité et de sa réussite . L ’ obstination et l ’ endurance font la force de certains artistes . J ’ ai trouvé la BD très juste à ce propos .
TM : En quoi consistait le travail d ’ adaptation ?
VM : Ancrer le récit dans le parcours initiatique de Polina . Représenter la rigueur du travail dans les studios , l ’ univers de création à travers l ’ improvisation , la danse fantasmée et sa représentation sur scène . Créer une narration qui intègre tous ces aspects de la danse . Nous voulions aussi fixer le récit dans un contexte social en référence à plusieurs personnalités du monde de la danse . Un milieu souvent modeste comme celui d ’ où vient Angelin mais aussi Pina Bausch , Noureev ... avec l ’ idée que quand on n ’ a rien , on a toujours un corps qui , par le travail , peut devenir un objet de revendication politique , l ’ expression même d ’ une indépendance .
TM : Comment s ’ est passée cette première co-réalisation ?
VM : On départ , on s ’ était dit « chacun son domaine de compétence », moi sur le jeu des acteurs , Angelin la caméra et puis , tout est devenu extrêmement poreux au fil du tournage . Angelin était tout de même particulièrement investi dans les scènes de danse !
AP : On a failli divorcer !! ( rires ). Non , mais il y a toujours des moments difficiles , de tension , car il y a toute une équipe derrière et des choix à faire , mais finalement , nous étions d ’ accord sur l ’ ensemble des décisions à prendre . Didier Crest , notre producteur nous a fait confiance dès le départ en nous laissant réaliser le film ensemble .
TM : Que voulez-vous faire passer à travers le personnage de Polina ?
VM : Polina est un personnage féminin fort qui va se construire dans la déconstruction . A un moment , elle fait fasse à ses contradictions , ses doutes et apprend de ses expériences . Ses incertitudes , ses cassures la forgent …
AP : On se construit avec ses points forts mais aussi avec ses failles . Polina est emblématique d ’ un parcours de vie
artistique avec une trajectoire singulière façonnée par son propre vécu .
TM : Comment avez-vous trouvé votre Polina ?
AP : On a auditionné près de six cents filles entre l ’ Europe et la Russie . Nous avons fait des essais danse qui nous ont permis de faire une première sélection , puis des essais caméra . Anastasia Shvetsova s ’ est démarquée par ses qualités de danseuse et sa présence devant la caméra . Elle est en retrait tout en étant très forte , comme Polina . Elle n ’ est pas bavarde dans le film mais ses regards intenses et l ’ expression de son corps dit tout .
VM : Elle a quelque chose de très fort à l ’ image . Quelque chose en plus qui relève du mystérieux … Anastasia a appris le français pour le film , Angelin a créé le duo final avec et pour elle . C ’ était fort de vivre cette aventure avec elle .
TM : Vous avez même ouvert des perspectives semble-t-il ?
AP : Oui ! C ’ est étonnant , le parcours d ’ Anastasia ressemble à celui de Polina . Elle était à l ’ illustre Ecole du Ballet Vaganova et , au moment où elle intégrait le Théâtre Mariinsky , on lui propose le film . Cette expérience a chamboulé ses choix de vie . Aujourd ’ hui , elle se pose beaucoup de questions , souhaite se tourner vers la danse contemporaine et pense à devenir chorégraphe !
TM : Pourquoi Jérémie Bélingard , danseur étoile du ballet de l ’ Opéra de Paris dans le rôle de Karl ?
AP : J ’ avais travaillé avec Jérémie à l ’ Opéra de Paris et j ’ ai rapidement voulu faire des essais avec lui . Il est brillant , attachant et s ’ est révélé très instinctif , à l ’ aise et naturel devant la caméra . Une vraie révélation !
Novembre / Décembre 2016 _ TM n ° 42 2
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