en attendant
TARTUFFEMolière
(Voyage de Monsieur
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sommaire
p. 2 à 5
en attendant tartuffe
TARTUFFE
Molière
Luc Bondy
p. 6
FLEURY EN SCÈNE
de Vienne à Paris)
LE VESTIAIRE
p. 7 à 10
les bibliothèques de l'odéon
shakespeare a 450 ans
p. 11 à 12
Une pièce de jeunesse(s)
UNE ANNÉE SANS ÉTÉ
Catherine Anne
Joël Pommerat
p. 13
le temps de la création
LES JOURNÉES EUROPÉENNES
DES MÉTIERS D'ART
le cercle de l'odéon
p. 14
Avantages abonnés
Invitations et tarifs préférentiels
p. 15
ACHETER ET RÉSERVER
SES PLACES
Qui est-il, ce monsieur Tartuffe ? Que
veut-il, que vaut-il ? Depuis qu'Orgon
l'a rencontré, sa piété tranquille est
devenue fanatisme, et son amitié pour
Tartuffe a tout d'une passion. Comment
donc un père de famille apparemment
sans histoires, soudain aliéné et comme
dévoré de l'intérieur par un effroyable
parasite, a-t-il pu succomber à une telle
emprise, jusqu'à faire don de tous ses
biens et vouloir livrer sa propre fille à un
inconnu rencontré par hasard quelques
semaines plus tôt ? Et jusqu'où devra
aller Elmire, son épouse, pour lui ouvrir
les yeux ? Il y a peu, Luc Bondy a signé
l'adaptation d'un Tartuffe en version
allemande dont l'épaisseur balzacienne
et la vivacité digne de Lubitsch ont fait
l'un des grands succès du printemps
2013 à Vienne. Il revient aujourd'hui à
l'original pour explorer les mécanismes
intimes, familiaux et sociaux qui rendent
possible le succès de l'imposture, tout
en nous mettant sous les yeux, entre
farce et terreur, le portrait génial d'un
incroyable aveuglement.
En mai 2013, Luc Bondy a présenté à
l'Akademietheater, qui est la deuxième
salle du Burgtheater de Vienne, un
Tartuffe dont il cosignait la version
allemande avec Peter Stephan Jungk.
Bondy choisit de saisir dans cette
nécessité de traduire l'occasion d'une
libération. La réussite du spectacle a
tenu pour une bonne part à ce refus
initial de se laisser dicter d'avance les
moindres détails de la mise en scène
au nom d'une fidélité trop littérale à
l'original. Tant dans le fond que dans
la forme, la traduction, d'une grande
cohérence, jouait franchement la carte
de la transposition. Bondy et son collaborateur ont renoncé d'emblée à restituer le vers moliéresque pour s'en tenir
à une prose contemporaine, confirmant l'ancrage de l'action dans une
époque qui pourrait être la nôtre. Chez
Molière, Madame Pernelle reproche à
sa bru d'aller «vêtue ainsi qu'une princesse» ; à Vienne, au XXIe siècle, Elmire
s'est retrouvée «attifée comme une
diva» (aufgedonnert wie eine Diva).
Cette décision de privilégier la vivacité
moderne de l'expression explique également que le rythme des échanges ait
été généralement accéléré. Lorsque
Madame Pernelle allonge un soufflet à Flipote pour la presser de sortir, il lui faut deux vers et demi (trente
syllabes, donc) pour commenter son
geste ; il ne lui en faut que neuf dans
l'adaptation allemande. Cependant,
à quelques détails et coupes près,
l'enchaînement des répliques ainsi
que leur teneur étaient rigoureusement respectés. L'actualisation et
l'explicitation du sens, délivré de sa
gangue historique, ne visaient qu'à
rendre plus accessibles les enjeux de
chaque scène, sans jamais affecter
la logique du développement dramatique. Même sans connaître l'allemand, un bon connaisseur de l'original
pouvait donc reconnaître sans mal la
plupart des grands moments de la
comédie et leurs mouvements caractéristiques. Et apprécier l'humour qui
sous-tendait certains écarts. Chez
Molière, Madame Pernelle n'entre en
scène et ne lance la pièce qu'avec
la ferme intention d'en sortir au plus
vite, à toutes jambes s'il le faut ; selon
Bondy, elle est clouée dans une chaise
roulante, et le tempo qui en découle
donne à toute l'exposition un relief
assez inattendu... Le public viennois,
lui, n'avait garde de comparer des
textes. Emporté par le plaisir du jeu,
il adhérait d'autant plus volontiers au
contrat proposé qu'il n'est pas familier autant que nous le sommes (ou que
nous sommes censés l'être) d'un texte
qui à nos yeux est un classique.
Lorsqu'il s'est demandé comment
compenser la perte irréparable du
Comme il vous plaira que devait monter
Patrice Chéreau, Luc Bondy a songé à
son Tartuffe. Il ne pouvait cependant
pas être question de programmer
huit ou dix semaines durant un spectacle en langue allemande, même au
Théâtre de l'Europe. Le retour au français s'imposait – mais lequel ? La tentation était grande de réintroduire la
liberté, la fraîcheur, la légèreté de ton
de la version viennoise dans la recréation parisienne. Autrement dit, d'adapter à son tour l'adaptation de Bondy
et Jungk.
Le geste pourrait surprendre, voire
choquer certains spectateurs. Il ne
serait pourtant pas sans exemple,
puisqu'il reviendrait en somme à traiter Molière comme le sont souvent les
grands maîtres du répertoire étranger.
Shakespeare, Tchekhov ou les tragiques grecs ont fourni plus d'une
fois un matériau théâtral que les
metteurs en scène ajustent à leur
guise, en s'autorisant d'ailleurs des
interventions autrement plus radicales que celles de Bondy abordant
Molière. Si personne n'y trouve à
Le fait
théâtral
obéit à ses
propres lois.
redire, sa