À première vue, ce qui précipite l’intrigue c’est l’absence d’origine du
personnage principal : Jack a été trouvé, bébé, dans un sac de voyage ;
il s’avère par un retournement ubuesque à la fin de la pièce qu’il est le
frère d’Algernon, autrement dit tout ceci n’était qu’une histoire de
famille. Cependant, cette question des origines n’est pas qu’une
question sociale. En effet, c’est le trou laissé dans l’histoire de Jack qui
explique le désordre de la pièce et les stratégies des personnages pour
ne rien y laisser paraître : « (Algernon) n’a rien, mais on dirait qu’il a
tout. Que peut-on désirer de plus ? » (172) Le sens de la réplique n’est
pas clair même si elle fait rire : signifie-t-elle qu’on ne peut jamais rien
avoir ? Cela remettrait en cause l’ordre capitaliste de notre société.
Peut-être la formule inversée serait-elle : « il a tout mais n’a l’air de
rien ». La question ne sera pas résolue dans le texte car la réplique ne
participe pas au développement de l’intrigue et se trouve rejetée,
comme tant d’autres, au rang de blague absurde. Cette énigme qui
sonne juste fonctionne donc de manière comique, et dévoile un savoir
sur le rapport à la castration et à l’image que l’Œdipe construit. Le
texte est parcouru de références au nonsense, ce qui est
malheureusement traduit en français par « sottises ». Nonsense,
absurde, voilà l’accusation dont est victime Algernon qui se rit des
conventions sociales par des formules pas toujours « intelligentes »,
mais « bien tournées » : « Toutes les femmes deviennent comme leurs
mères. C’est leur tragédie. Les hommes non. C’est leur drame à
eux. » (83)
Il y a quelque chose de l’ordre du monde et de sa loi, de ce qui a trait à
l’Œdipe, qui ne tient plus : « Le complexe d’Œdipe ordonne : il met de
l’ordre et il commande » nous éclaire M. Lapeyre, qui montre très bien
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