ReMed Magazine Savoir & Vivre
“Trop d’hygiène
tue l’hygiène”
Mona Sabrine MAYOUF
En cherchant toujours à être en sécurité, on s’acharne contre les micro-organismes comme ennemi
juré à éradiquer, les incriminant toujours comme principale cause de maladie. S’ensuit alors une
guerre sans merci cherchant à neutraliser le maximum de ces accusés. Les compagnies de détergents
se concurrencent alors pour mettre fin aux 0.001% de bactéries subsistantes. Mais s’il n’était même
pas question de déclarer la guerre ?
Les micro-organismes et l’homme, qui colonise qui ?
L
es micro-organismes ont existé sur la bleue des
milliards d’années avant l’homme. Ce dernier ne
s’est aperçu de leur présence qu’au IXX siècle avec les
théories avancées par Louis Pasteur sur les traces des
chercheurs qui l’ont précédé. Loin d’élucider le dilemme
colonial, il nous est indiscutable aujourd’hui d’avouer
que la présence de certains micro-organismes vivant
en symbiose nous est vitale. Le complexe microbiote
(l'ensemble des micro-organismes vivant dans un en-
vironnement spécifique nommé microbiome) humain
comprend environ 10 14 cellules, un nombre supérieur
à l’ensemble des cellules composant le corps humain
lui-même. Plusieurs recherches sont menées pour
comprendre au mieux la relation de l’homme à son
microbiote. Ainsi, le microbiote intestinal contribue à
la biotransformation et digestion alimentaire, à la pro-
duction de certaines vitamines et à la lutte contre l’in-
stallation de la flore pathogène.
La flore cutanée, quant à elle, est colonisée par des tril-
lions de micro-organismes, souvent symbiotes entre le-
vures, bactéries, virus, champignons, etc. Un microbiote
diversifié de plus de 500 espèces différentes, étalé
sur toute la peau, faisant du microbiome cutané siège
de divers échanges indispensables à l’homéostasie du
corps humain. Le microbiote et microbiome cutanés
constituent dès lors un écosystème que la science n’a
su exploré que peu pour le moment.
La flore cutanée peut être subdivisée en deux grands
groupes :
- La flore permanente (ou résidente) : elle est consti-
tuée de germes commensaux (vivant au dépend de
l’hôte sans pour autant être pathogènes). Elle est en
général de composition fixe et apte à se régénérer
après perturbation.
- La flore transitoire : elle est composée de micro-or-
ganismes généralement saprophytes (se nourrissant
de matières organiques en décomposition provenant
de l’environnement). Toutefois, celle-ci peut comporter
des germes pathogènes et opportunistes. Sa distribu-
tion sur la peau est hétérogène et sa présence varie
selon l’activité et les conditions environnementales.
Le microbiote cutané et le bien-être de la peau
Figure 1:microbiote cutané
Src : https://www.revmed.ch/RMS/2016/RMS-N-512/Le-mi-
crobiote-cutane-le-poids-lourd-sort-de-l-ombre
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ReMed
Automne 2017
Avec l’avancée qu’ont connue la microbiologie et l’im-
munologie, la considération du microbiote humain a
pris une toute autre tournure. La flore, transitoire fut
elle ou résidente, ne menace pas le bien-être de l’hôte
tant que la barrière épidermique et les réponses immu-
nitaires sont intactes, bien au contraire, elle peut être
bénéfique pour l’organisme. La flore cutanée commen-
sale permet de lutter contre l’invasion microbienne
pathogène, en entravant la colonisation de plusieurs
espèces nuisibles.