Puissance et sécurité à l'épreuve des conflits du Proche-Orient. IHEDN_AR-18_C79_2015-2016_Sécurité et puissance | Page 8
ennemis sont toujours les mêmes : les immigrés, ces parasites qui vivent à nos crochets et nourrissent
l'insécurité; les musulmans inassimilables et réceptifs à l'islamisme ; les élites mondialisées qui leur ouvrent
grand nos portes; la bureaucratie bruxelloise, qui prétend imposer aux peuples ses diktats cosmopolites et
défaire les nations...
Les crises que traversent actuellement les sociétés européennes (ou, plus largement,
occidentales) en pleine mutation sont extrêmement déstabilisatrices et sont porteurs de risques de
dislocation que les flux migratoires ou le terrorisme djihadiste peuvent amplifier.
I – 2 La question des migrants : frontières et sécurité
Le mot frontière a une origine militaire : il est étymologiquement lié au mot « front » et désigne au
départ un type particulier de limite : la limite fortifiée, protégée.
Les États ont souvent placé d'importantes forces militaires sur les frontières. Un mur peut être créé
pour surveiller le passage ou protéger d'éventuelles attaques ; c'était la raison d'être de la Grande Muraille de
Chine, et plus récemment en France de la ligne Maginot. Lorsqu'ils ne construisent pas de muraille, certains
États placent des garnisons importantes le long de la frontière. Au XVII ème siècle, de nombreux forts sont
ainsi construits sous l'impulsion de Vauban pour protéger les territoires du roi de France. La présence
militaire joue alors parfois un rôle structurant dans ces régions.
Au XX ème siècle toutefois, les technologies militaires se sont transformées, les moyens de transport
ont gagné en rapidité, les avions et les missiles passent sans encombre les murailles terrestres, la fortification
militaire de la frontière dès lors n'est plus un outil primordial de la défense nationale.
Si la population française est le résultat de l'amalgame des différentes migrations qui ont sillonné
l'hexagone au fil des siècles, les flux migratoires contemporains posent de nouveaux problèmes du fait de
leur nombre et de leurs origines. Les mouvements de la province vers les centres industriels auxquels
s'ajoutent des migrations essentiellement européennes, constituent le nouveau visage de la population
française aux XIX ème et XX ème siècles. Mais au cours du XX ème siècle, avec les conséquences de la politique
coloniale, le pays voit arriver des contingents africains et asiatiques.
Les relations internationales contemporaines ont généré un phénomène migratoire important du
Moyen-Orient, d'Afrique, d'Asie vers l'Union européenne. Comment gérer cet important afflux ? Réponse
européenne ? Réponse nationale ? Réponse humaine ?
Fuyant la guerre, la pauvreté, la persécution, plus d'un million de personnes sont entrées en Europe.
Le directeur de l'OIM 11 a exhorté les gouvernements européens à faire de la migration sûre : "Elle est
inévitable. Elle doit être légale et sécuritaire pour tous, à la fois pour les migrants et les pays qui deviendront
leur nouvelle maison". La plupart des migrants entrent par la Grèce et l'Italie.
Les gouvernements européens ont du mal à se mettre d'accord. La construction d'un mur en Hongrie
a irrité les pays voisins et déclenché une ruée chaotique pour trouver des routes alternatives vers des pays
mal équipés pour gérer cet afflux. L'Allemagne et l'Autriche ont annoncé qu'ils ne peuvent plus faire face à
l'arrivée de réfugiés ; la France ne veut pas en accueillir plus de 30 000 par an. L'Allemagne souhaite des
plans pour assouplir les règles d'expulsion des criminels étrangers et resserrer les règles pour les demandeurs
d'asile. Le Danemark a pris la mesure de laisser la police saisir les objets d'une valeur supérieure à 1 500 €
pour couvrir le logement et la nourriture. En Angleterre et au Pays de Galles, les demandeurs d'asile se sont
sentis stigmatisés.
11 OIM : Organisation internationale pour les Migrations
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