PALESTINE Mémoires de 1948 - Jérusalem 2018 | Page 153
Bethlehem, Grotte du Lait
entre familles musulmanes et chrétiennes qui s’était
soldée par le meurtre d’un musulman. Selon les tradi-
tions en vigueur, les tribus chrétiennes avaient dû fuir
afin d’éviter les représailles et émigrer dans la région de
Madaba, où elles avaient trouvé un terrain habitable,
mais qui faisait partie du domaine de pâturage d’autres
tribus. Après avoir obtenu le permis de Constantinople,
la capitale de l’Empire ottoman, les chrétiens de Karak
purent, après d’âpres batailles, s’établir sur ces terres où
ils fondèrent la ville de Madaba. Mais comme labourer
leur terre nécessitait une main-d’œuvre qu’ils n’avaient
pas, ils embauchèrent des musulmans qui percevaient
le quart de la récolte en tant que salaire. Peu à peu ces
derniers s’établirent en ville. Et lorsque je suis arrivé en
1955, ils représentaient presque la moitié des habitants.
En 1956, le 19 mars, jour de la Saint-Joseph, il y eut
un affrontement à Madaba qui fit six morts : trois du
côté chrétien et autant du côté musulman. Le roi Hus-
sein, qui venait d’être intronisé 5 , intervint très vite. Le
couvre-feu fut décrété pendant deux semaines, jusqu’à
ce que les tribus fassent la paix. Puis tout était rentré
dans l’ordre.
Après Madaba, je suis allé à Beyrouth, étudier la
langue arabe à l’université Saint-Joseph, et je me suis
retrouvé, là encore, au milieu de tirs et d’attentats
– c’était sous la présidence de Camille Chamoun.
À notre grand soulagement, cela n’a pas duré.
Lors de la guerre des Six-Jours, en 1967, j’étais
directeur des écoles du Patriarcat en Cisjordanie. J’étais
allé à Jérusalem pour acheter des machines à écrire, et
j’étais juste au Patriarcat latin le matin du lundi 5 juin,
sur le point de partir, lorsque de ma chambre, qui don-
nait sur le mur d’enceinte de la vieille ville, j’ai vu des
soldats jordaniens tirer du haut des remparts. La guerre
Michel
MEMOIRE_PALESTINE_FR.indd 151
151
20/02/2019 13:38