Oil&Gas Buisiness Issue Volume 15 | Page 3

EDITORIAL

Par Redouane Malek

Energie nucléaire pour l ’ Algérie , mythe ou réalité ?

Alors que le pétrole recouvre un peu de ses couleurs en regagnant laborieusement dollar après dollar une valeur durement éprouvée depuis l ’ été 2014 , et que les deux plus grands acteurs du marché pétrolier , prédisent de plus en plus un rééquilibrage positif des prix , marqué par un retour aux fondamentaux , les algériens ont reçu comme une douche froide , l ’ annonce du volume du déficit de la balance de paiement de près de 14 milliards de dollars en à peine deux mois . La nouvelle a suffit pour relancer la hantise du spectre d ’ une mise en difficulté des finances du pays , de la fonte du matelas de devises , de l ’ amenuisement jusqu ’ à sa disparition du FRR , et du retour à l ’ endettement . Dans ce tumulte , se pose avec inquiétude la question du devenir énergétique du pays , notamment depuis la visite du premier ministre à Moscou , où la question de la coopération entre les deux pays dans le domaine de l ’ énergie nucléaire semble prendre de l ’ essor . Certes le sujet n ’ est pas nouveau , mais le voir apparaître en pleine période de restrictions drastiques des ressources financières nationales , inquiète à plus d ’ un titre sur le sens autant que sur le bien fondé de cette future coopération . Le décret présidentiel n ° 14-378 du 30 / 12 / 2014 , publié au Journal officiel du 25 / 01 / 2015 , renseigne d ’ une manière détaillée sur le contenu de la coopération entre l ’ Algérie et la Russie dans le domaine de l ’ utilisation de l ’ énergie nucléaire à des fins pacifiques , et c ’ est justement le point sur l ’ utilisation des réacteurs nucléaires à des fins de production de l ’ électricité , de la chaleur et du dessalement de l ’ eau de mer , qui soulève le plus d ’ interrogations , mais aussi le plus d ’ inquiétude quant à la pertinence de ce choix , mais aussi de l ’ entrainement d ’ autorité de tous un pays sur une question qui relève de la consultation exclusive de sa population . Le gouvernement échaudé par les oppositions manifestées contre la question du gaz de schiste , à cause d ’ un défaut de communication et de sensibilisation , se risquera t-il sur un domaine où la cohésion de la nation est de rigueur pour un projet de cette importance et de cette sensibilité . Les observateurs politiques ont toujours adopté une réaction sereine sur la position de réserve et de prudence du président Bouteflika quant à l ’ usage du nucléaire , une position qui avait eu en son temps le mérite de ne pas inscrire le pays dans des turpitudes dont il a d ’ ailleurs grâce à cela , pu faire l ’ économie . Mais aujourd ’ hui , peut-on garder une telle sérénité , alors que des voix et des porte-voix s ’ aventurent à spéculer sur la perspective du pays de se doter d ’ une centrale nucléaire pour la production de l ’ électricité dans une dizaine d ’ années . Quid alors des coûts ? de l ’ orientation des énergies renouvelables comme priorité nationale ? de la problématique des déchets nucléaires ? Autant de questions inopportunes sinon inutiles et ennuyeuses dans le contexte sécuritaire mondial d ’ aujourd ’ hui , où le choix de notre mix énergétique semblait pour nous déjà tracé , entre un gaz en abondance et un solaire plus que présent et disponible à profusion . Quelque soit la puissance de l ’ imagination , la lucidité et le pragmatisme doivent reprendre leur place , il nous faut « savoir raison garder ».
OIL & GAS business / NUMÉRO 15 / mai 2016 / 3