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Rue des Beaux-Arts n ° 76- Juillet-Août-Septembre 2021
conteste roulé au fond du caniveau , au grand dam de ses amis fidèles qui essaient en vain de lui tenir la tête hors de l ’ eau , mais il est bien certain malgré tout qu ’ il continue désespérément à regarder les étoiles .
Ses amis , ses dernières relations , Isusi leur donne la parole , dans une galerie de portraits qui coupe régulièrement la ligne du récit pour permettre à chacun de donner sa propre vision d ’ Oscar Wilde tel qu ’ ils l ’ ont connu aux jours meilleurs . On voit ainsi défiler Robert Ross ( Robbie ), Lord Alfred Douglas ( Bosie ), Frank Harris , André Gide , Harold Mellor , Reginald Turner ( Reggie ), Manuel Machado , Maurice Gilbert , Robert Sherard , toute une partie du cercle Wilde , ceux qui l ’ ont le mieux connu du temps de sa splendeur , et qui sont encore là , pour la plupart , au moment où il n ’ est plus que l ’ ombre de lui-même .
Mais tant les amis qui l ’ entourent que la compagnie des jeunes hommes qu ’ il paye , souvent sans rien demander d ’ autre que la vue de leur beauté dénudée , et dont la jeunesse lui donne encore l ’ illusion de vivre , on devine bien qu ’ ils ne lui sont d ’ aucun secours . Car eux sont encore dans le bruit du monde , et Wilde n ’ y est déjà plus . C ’ est un homme qui coule en silence ( pas tout à fait en silence , car il possède encore sa verve et son esprit , mais un esprit adouci et comme résigné à son sort .) C ’ est un comdamné en sursis , un mort vivant qui avance à pas lourds vers sa fin .
Wilde a traversé la vie comme une comète . Mais toute vie est un théâtre , et celle de Wilde , avec ses ombres et ses lumières , ses fulgurances et ses drames , l ’ est plus que tout autre . Isusi l ’ a bien
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