Rue des Beaux-Arts n° 73 – Octobre/Novembre/Décembre 2020
des grandes auditions musicales de France de la comtesse Greffulhe
au Théâtre-Lyrique municipal de la Gaîté en mai. Le lieu a ensuite
été changé pour le Théâtre du Châtelet. Cette nouvelle information
impliquait une raison différente pour laquelle Gailhard aurait pu
s’opposer à une représentation de l’œuvre allemande à l'Opéra:
l’intrigue pourrait amener les censeurs à interdire la représentation.
De plus, le journaliste a déclaré “que si l’on ne joue pas Salomé en
français, ce n’est pas à cause des horreurs du texte d’Oscar Wilde:
c’est tout uniment parce que M. Richard Strauss n’a voulu à aucun
prix de la ‘traduction’ nouvelle qui lui a été soumise.”
La vraie raison du refus de Gailhard de faire jouer Salomé ne réside
pas dans son texte insondable ou dans une éventuelle censure mais
peut-être plutôt dans les problèmes entre Strauss et la Société des
auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), l’organisation
responsable en France de la protection des droits d’auteur, d’obtenir
des redevances et d’autoriser des représentations. Pour être joué
dans l’un des théâtres de Paris, qui doivent tous avoir des traités
avec la SACD, Strauss devait se faire membre de cette société. Le
compositeur allemand refusa de signer le contrat type exigé par la
SACD car, selon lui, certains articles des statuts pouvaient être
considérés comme restreignant ou portant atteinte à ses droits dans
d’autres pays avec lesquels il a ou peut encore contracter. Il proposa
donc une modification aux statuts, modification qui lui a été refusée
comme antilégale. Lorsqu’Alfred Capus, président de la SACD, a
refusé de supprimer la clause, Strauss a exigé une lettre dans
laquelle on déclarerait que son adhésion aux statuts ne l’obligeait
qu’en ce qui concerne les représentations de ses œuvres en France,
en Belgique et dans la principauté de Monaco. Il ne reçut la
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