Rue des Beaux-Arts n° 72 – Juillet/Août/Septembre 2020
Wilde mentionne avoir dîné avec lui en mai 1898 ; et il est l’un des
rares à s’être présenté à l’Hôtel d’Alsace pour offrir ses respects
quand Wilde y est mort. Sa pièce, La Belle au Bois Dormant, a été
jouée avec des décors de Burne-Jones, qui était l’oncle de Kipling. Il
a également écrit un travail de scène pour une pièce de théâtre sur
Salomé. Cette version, La Tragédie de Salomé, sur une musique de
Florent Schmitt, a été dansée par Loïe Fuller au Théâtre des Arts en
1907, et par Karsavina en 1913. (Dans son adaptation filmée de la
nouvelle de Kipling « L’homme qui voulut être roi », John Huston
s’inspire d’un paragraphe de la nouvelle évoquant la tête décapitée
de Daniel Dravot en utilisant l’image-choc d’une tête coupée). Le fait
que d'Humières ait dû être attiré à la fois par Kipling et Wilde
suggère la possibilité d'affinités qui ne sont guère établies jusqu'à
présent - après tout, l’esthétique d’écriture de chacun des deux
hommes est très différente: Pour Wilde, le réalisme de Kipling
confinait à la vulgarité.
La première visite de Kipling à Paris eut lieu en 1898, avec son père
(John Lockwood Kipling), qui travaillait au Pavillon Indien de
l’Exposition Universelle de cette année-là. Il laissa Rudyard se perdre
en toute liberté dans la ville. « Ce fut une éducation en soi ; (écrivit
Kipling) et ceci déclencha mon amour de toute une vie pour la
France. Il veilla également à ce que j’apprenne à lire le français, au
moins pour mon propre amusement, et il me donna Jules Verne
pour commencer. À mon époque, apprendre le français n’était pas
bien vu dans les écoles anglaises et sa connaissance était censée
connoter un penchant à l’immoralité » 1 (comme Lady Bracknell
l’affirme dans « The Importance of Being Earnest » : Je ne peux pas
1
Rudyard Kipling. Something of Myself, Macmillan Pocket, 1937, p.24.
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