Rue des Beaux-Arts n° 72 – Juillet/Août/Septembre 2020
de cas, comme s’il avait été éclipsé par l’écrasante personnalité
de la spectaculaire Speranza qui, dans le cœur d’Oscar, prend
pratiquement toute la place dévolue à la famille. C’est vers
l’héritage maternel que celui-ci se tourne en s’orientant vers les
lettres classiques, la poésie, la littérature. Pas un instant, ni lui,
ni son frère Willie, n’ont songé à se faire les successeurs de leur
père en embrassant la carrière médicale. Cependant, le fils
illégitime de Sir William, Henry Wilson (qui passait pour son
neveu), a reçu de son père secret une excellente formation
médicale et chirurgicale qui lui permettra de l’assister à l’hôpital
et de reprendre le cabinet délaissé par Sir William après la mort
de ses trois filles (deux illégitimes et une légitime qui périrent
toutes trois très jeunes).
La mort d’Isola, petite sœur adorée d’Oscar, âgée de dix ans à
peine, fera surgir pour la première fois la maladie dans la vie du
jeune Oscar. La disparition d’Isola, victime d’une fièvre cérébrale
qui dégénéra en scarlatine, fut une tragédie immense pour toute
la famille. Mais peut-être le fut-elle plus encore pour William
Wilde, éminent médecin, qui accomplissait des prodiges, mais ne
fut pas capable de sauver cette petite fille qui avait illuminé la
vie de toute la famille. Peu à peu, il se laissa sombrer dans une
mélancolie dépressive qui l’entraîna vers la mort, à l’âge de 61
ans.
À Oxford, Oscar avait échappé au cercle des médecins. Son
grand-père était mort depuis longtemps, son père et son demifrère
(qu’il prenait pour un cousin plus âgé) exerçaient au loin
leur pratique. Autour de lui, plus aucun médecin. Sauf, peutêtre,
si l’on en croit la rumeur (contestée), au moment où il fut
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