Rue des Beaux-Arts n° 72 – Juillet/Août/Septembre 2020
aussi ironiquement, ou au pied de la lettre, un truisme énoncé
dans « The Critic as Artist » : « great works of art are living
things », « the only things that live » 1, proposition que l'auteur
dénonce préalablement contre toute attente dans le même essai,
par goût du paradoxe ou de l'auto-contestation :
The image stained upon the canvas possesses no
spiritual element of growth or change. If they know
nothing of death, it is because they know little of life,
for the secrets of life and death belong to those, and
those only, whom the sequence of time affects [...]. 2
La problématique de la représentation picturale ne laissait
toutefois pas de passionner l'auteur de Dorian Gray. C'est en ce
sens qu'il s'intéressa un temps, selon Richard Ellmann, à la
théorie du critique, esthète et dramaturge allemand Gotthold
Lessing, sur les liens de nature qui se tissent, premièrement
entre la peinture et l'espace, deuxièmement entre la littérature et
le temps, et qu'il aurait songé à briser ces catégories. A l'aide de
mots, il décrirait un tableau possédant les caractéristiques que
Lessing refusait à la peinture en situant le portrait défiguré dans
la chronologie de la trame romanesque et, partant, dans la
chaîne temporelle, non sans l'inscrire paradoxalement dans
l'éternité du mythe, au lieu de le figer dans l'espace. 3
La notion même de portrait n'en est pas moins problématique,
dès qu'il est question de littérature. Si l'on admet qu'un écrivain
1 Ibid, p. 1132.
2
3
Ibid., p. 1124.
Richard Ellmann, Oscar Wilde, Penguin Books, London, 1987, p. 294.
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