Rue des Beaux-Arts n° 72 – Juillet/Août/Septembre 2020
puisse faire le « portrait » d'un personnage, en proposant de lui
une description aussi bien physique que psychique, on sait
aussi que la seule description, y compris dans le cas où un
tableau authentique en fait l'objet, ne peut rendre compte de ce
qu'est le travail véritable du peintre, de l'agencement des
couleurs, de l'effet esthétique produit. On pourrait enfin
appliquer au portrait littéraire ce que Wilde dit de la peinture
dans « The Decay of Lying », où il explique que l'artiste a pour
mission de percevoir l'objet tel qu'il n'est pas et de rendre
compte de l'autre dans le même :
The only portraits in which one believes are portraits
where there is very little of the sitter and a very great deal
of the artist. [...] It is style that makes us believe in a thing
- nothing but style. Most of our modern portrait painters
are doomed to absolute oblivion. They never paint what
they see. They paint what the public sees, and the public
never sees anything. 1
Quoi qu'il en soit, si l'exégèse est possible, que peut-elle dire de
ce qui appartient seulement à la trame romanesque et qui, par
conséquent, ne sera jamais « vu » ? La réponse que l'on peut
apporter est que s'interroger sur le « portrait » en littérature
conduit à évoquer l'irreprésenté et peut-être l'irreprésentable au
moins autant que le représentable, ce qui ne peut que conduire
1
Op. cit., p. 1089.
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