N° 80 | Page 40

Rue des Beaux-Arts n ° 80- Juillet – Août – Septembre 2022
Nous sommes dans le cachot d ’ Oscar Wilde , juste avant la rédaction du De Profundis . La nudité de l ’ enfer est montrée sans complaisance . La nuit est omniprésente , la nuit physique et la nuit de l ’ esprit - cette tombe pour ceux qui ne sont pas encore morts , selon ses propres mots- ainsi que l ’ absolue solitude d ’ une souffrance unique au milieu d ’ une ruche d ’ autres souffrances .
Le drame est scandé par une stridence insupportable qui torture le prisonnier depuis qu ’ il s ’ est blessé à l ’ oreille en tombant à la chapelle de la prison de Wandsworth quelques mois plus tôt , avant son transfert à Reading . La douleur lancinante de cette blessure ne le quitte pas , comme ne le quitte pas la honte de l ’ humiliation publique que lui a valu son transfert , d ’ une prison à l ’ autre .
Pour ne pas se laisser recouvrir par l ’ ombre et trouver la force d ’ écrire son expérience , il lui faut dépasser son présent immuable , ne plus se réduire à C . 3.3 mais revenir à qui il est .
Alors , inconsciemment Wilde s ’ invente un autre lui-même , ou plutôt , il se voit tel qu ’ il fut , un dandy aux cheveux longs et habillé comme pour sa tournée de conférences en Amérique . Le personnage est une
40