Rue des Beaux-Arts n°69 – Octobre/Novembre/Décembre 2019
Ces répétitions obstinées sont ses seuls mots pendant une période
prolongée. En plus, la répétition sert à exprimer la magie incantatoire
des paroles. De longues listes d’objets précieux et d’images lointaines,
l’imagerie et le vocabulaire biblique, la simplicité schématique de la
structure de la phrase et une profusion de réitérations combinent ce
jeu linguistique en un chef-d’œuvre artistique. La technique
linguistique de Wilde découle de ses affinités avec l’œuvre de Maurice
Maeterlinck et le style biblique du Cantique des Cantiques avec ses
métaphores et énumérations de phrases parallèles. Les mots de Wilde
sont presque prophétiques quand il parle dans The Decay of Lying de
“a language different from that of actual use, a language full of
resonant music and sweet rhythm, made stately by solemn cadence, or
made delicate by fanciful rhythm, jewelled with wonderful words” (CW
1079). En plus de la musicalité dans le langage, les images, le rythme
et les répétitions, Salomé contient des références aux instruments de
musique en métaphores et comparaisons, tels que “the red blasts of
trumpets” (CW 590) qui ne sont pas aussi rouges que la bouche de
Iokanaan et la voix du jeune syrien qui sonne “like the sound of the
flute, of a flute player” (CW 591). La musicalité du style wildien est une
des raisons pour laquelle tant de compositeurs s’intéressent dans
l’œuvre de Wilde (cf. RdBA 66 § 9 ‘Mad Scarlet Music’).
Les références à la culture musicale anglaise contemporaine
Les quatre années précédant sa détention sont la période des comédies
et des grands succès littéraires. Avec The Picture of Dorian Gray, les
quatre comédies fournissent des informations utiles sur la culture
musicale contemporaine. Wilde illustre le rôle de la musique à la fin du
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