Montréal pour Enfants vol. 23 n°4 / La Rentrée 2023 | Page 18

les effets : « On peut l ’ amener à réfléchir en disant ‟ Mais , toi , qu ’ est-ce que tu ressentais vraiment ? Toi , que penses-tu qu ’ il ressort de cette situation-là ?” Il faut l ’ amener à raisonner plus rationnellement pour déterminer ce qui lui appartient et ce qui appartient aux autres . »
On peut se demander pourquoi il est si important de faire la différence entre ce que ressent l ’ autre et ce que nous ressentons nous-mêmes , lorsque le but ultime de l ’ empathie est justement de se mettre à l ’ écoute d ’ autrui . Madame Girard répond que , d ’ abord , elle permet de chercher plus activement des façons d ’ apaiser un tiers qui ne sont pas forcément les mêmes que celles qui nous font du bien . Madame Girard indique que l ’ enfant peut commencer à démontrer les signes modestes de cette différenciation entre ses besoins , ses plaisirs et ceux d ’ autrui vers 7 ou 8 ans : « Lorsqu ’ il va faire la carte de fête des Mères , il va peut-être colorier la fleur jaune sur la carte , parce qu ’ il sait que c ’ est la couleur préférée de sa maman . Cela montre qu ’ il comprend que , pour faire plaisir à l ’ autre , il ne faut pas nécessairement colorier la fleur rose parce que le rose est sa couleur préférée à lui . »
Des proches pas trop sympathiques
La psychologue en profite aussi pour préciser que l ’ empathie ne doit pas être confondue avec le besoin de plaire à tout prix ou la tendance à prendre les problèmes d ’ un tiers sur ses épaules . De l ’ avis d ’ Émilie Girard , lorsque le souci de soi domine la relation , on devient moins utile à celui ou à celle que l ’ on prétend vouloir aider .
Émilie Girard pense néanmoins qu ’ une meilleure connaissance de soi permet d ’ être un peu plus sûr de ce que l ’ on est réellement capable d ’ apporter : « Une personne qui n ’ a pas développé une bonne estime d ’ elle-même ou une bonne connaissance d ’ elle-même et de ses émotions ne sera pas capable d ’ être empathique , parce que la personne va toujours avoir tendance à se sécuriser elle-même . Elle va être trop happée par ses propres problèmes . »
Ce besoin de se protéger des émotions et des remises en question que pourrait susciter celui qui demande notre soutien est alors susceptible d ’ éveiller des mécanismes de défense , comme de s ’ éloigner ou de nier les réalités qui font trop peur . Carole Lane , chef du service de psychologie du CHU Sainte-Justine , assure que la distance émotionnelle qui permet de jouer un rôle empathique n ’ a rien à voir avec cela . Il contribuerait plutôt à nous garder disponibles : « Lorsque je parle de prendre une distance dans l ’ empathie , je parle de prendre une distance relationnelle . Ce n ’ est pas de se retirer . Lorsqu ’ on décide de se retirer en se disant que cela va trop nous bouleverser , là , on se défend du rapprochement . Lorsqu ’ on est en mesure de reconnaître et de se dire que l ’ autre a de la peine , que cela nous touche , on peut se dire ensuite ‟ Ce n ’ est pas moi ” ».
LES ÉLÉMENTS DE BASE
Identifier chez les autres des émotions qu ’ il a connues permet à l ’ enfant de comprendre ce que lui-même ressent , lorsqu ’ il entre en interaction . Mais comment l ’ entourage peut-il contribuer à cette exploration intérieure ?
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