Montréal pour Enfants vol. 23 n°1 / Relâche 2023 | Page 38

Une aire créative à protéger
La question avant la réponse
Les questions et les suggestions de Maria Riccardi visent aussi à guider le regard des enfants et à leur recommander des façons de varier les perspectives , afin qu ’ ils parviennent un peu mieux à saisir les outils de création à leur portée : « Lorsque je regarde une œuvre d ’ art avec les jeunes , je me déplace . Parfois , on va tous plus loin , puis on se rapproche , et on se demande ce qui se passe différemment dans ce que l ’ on voit . C ’ est vraiment très actif . »
Bien sûr , lorsqu ’ elle se retrouve avec plus d ’ un enfant en contexte de création , cette enseignante doit veiller à ce que chacun y trouve son compte et aussi à ce que la maladresse des uns ne vienne pas trop porter ombrage ou blesser l ’ expression de la créativité des autres . Maria Riccardi doit être vigilante lors des interactions qu ’ elle sollicite . « C ’ est sûr que , moi , comme enseignante , j ’ aidais des enfants à nommer ce qu ’ ils ressentent . Et même un leader qui est très négatif , il faut lui apprendre à voir la vie différemment . Ce n ’ est pas en le mettant à l ’ extérieur d ’ une équipe qu ’ on va l ’ aider . La créativité , c ’ est aussi une façon d ’ orchestrer les forces de chacun . »
Une aire créative à protéger
Maria Riccardi prévient toutefois que l ’ adulte devrait intervenir en gardant en tête les avantages pour un enfant de demeurer au sein d ’ un espace où il ne se sent pas jugé pour ce qu ’ il a dit ou fait , lorsqu ’ elle doit lui indiquer ses limites : « Il faut amener l ’ enfant à chercher un sens , pour qu ’ il puisse réfléchir sur ce qu ’ il a créé , sur ce qu ’ il a dit , pour qu ’ il puisse en parler sans avoir peur . On peut ouvrir la porte à ce que quelqu ’ un amène une autre façon de voir sans qu ’ il se sente jugé . Si on sait que l ’ on a le droit de parler et même de faire des erreurs , c ’ est beaucoup plus facile . »
Mélissa Paquette reconnaît également que la peur des conséquences , par ce que notre imaginaire révèle tant aux autres qu ’ à nous-mêmes , joue un rôle très significatif dans la capacité de l ’ enfant à créer . Il doit donc percevoir que sa relation à l ’ autre ne risque rien , qu ’ il ne se sentira pas jugé , et aussi qu ’ il sera soutenu s ’ il dévoile des aspects de lui-même qui l ’ effraient .
La question avant la réponse
Lorsque l ’ enfant a achevé l ’ étape de la création , le travail du parent n ’ est pas encore terminé . Quand l ’ enfant lui présente sa dernière œuvre , le parent ne comprend pas toujours et parfois la réalisation de cette « œuvre » lui semble même un peu maladroite . Mais qu ’ importe , si le parent ne parvient pas à voir dans son petit bout d ’ homme ou de femme le futur Van Gogh , Pierre Laurendeau propose d ’ interroger l ’ enfant pour favoriser la relation et une réaction plus stimulante que le traditionnel « C ’ est joli ». « Quand il y a un enfant , que son dessin est beau , est-ce que la conversation s ’ arrête là ? Je pense qu ’ il est beaucoup plus intéressant de prendre du temps avec l ’ enfant . Autrement dit , le dessin devient un intermédiaire pour communiquer avec lui . »
Ces experts ne prétendent toutefois pas qu ’ une telle démarche , si bien fondée soitelle , garde les parents à l ’ abri de tout risque de dérives ou de mésinterprétation . Dans cet espace où parents et enfants tentent d ’ échapper aux règles de la performance , quelques suppositions divergentes contribueront peut-être à donner un nouveau souffle aux derniers rêves mis en scène ou venus se reposer sur le papier …
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