Montréal pour Enfants vol. 23 n°1 / Relâche 2023 | Page 24

Puis jaillit le symbole
Discrètement , l ’ imaginaire amorce son rôle dès que l ’ enfant ressent le besoin d ’ implanter quelques fils conducteurs , si fantaisistes soient-ils , pour parvenir à établir la toile de fond de l ’ univers avec lequel il tente d ’ interagir . Pierre Laurendeau , professeur de philosophie et auteur du livre Des enfants pensent l ’ avenir , explique qu ’ il s ’ agit pour l ’ enfant d ’ une nécessité : « C ’ est ça l ’ imagination : l ’ enfant fait le lien entre deux choses et il les met en relation . Le développement de la pensée fonctionne aussi comme cela . Dans le logos , le terme grec d ’ où vient la logique , il y a cela aussi : la capacité de mettre les choses en relation . Les enfants le font spontanément … lorsque nous leur laissons l ’ espace pour le faire . »
Autour de la créativité se construisent leurs liens d ’ attachement et les sensations à l ’ origine des premiers mots . Mélissa Paquette parle alors d ’ un mécanisme assez automatique , qui se renforce et se complexifie à partir des actes répétés , surtout des premiers responsables de soins . « Quelque chose survient et j ’ emmagasine un souvenir , souvent sous forme d ’ images , auxquelles sont associées des sensations physiques , surtout chez les bébés . Et c ’ est par le parent qu ’ éventuellement il y aura des mots reliés à cela , donc un langage , des émotions , des pensées , des idées transmises par ce langage . »
Puis jaillit le symbole
On voit toutefois l ’ imaginaire se manifester de manière flagrante lorsque l ’ enfant reprend des bribes de sa réalité et de sa perception de ce qu ’ est un père , une mère , un cuisinier ou un bon repas de famille pour le re-cuisiner à sa sauce dans une activité de « faire semblant ». Ainsi , dès 2 ans , l ’ enfant commence à prendre plaisir à se réapproprier et à manipuler ses souvenirs , comme auparavant sa pâte à modeler , relate Mélissa Paquette . « Si je prends un enfant qui joue avec un bol et une cuillère en bois et fait semblant de manger , pour moi , ça , c ’ est un jeu de “ faire semblant ”, parce que la nourriture n ’ est pas là pour de vrai . Donc , on reste très proche de la réalité du quotidien , mais en même temps , c ’ est un jeu de “ faire semblant ” ».
L ’ enfant entremêle alors la réalité des objets , bien tangibles , qui l ’ entourent , avec les souvenirs et les intentions qui proviennent de son for intérieur . Avec le temps , il parvient à créer des jeux qui durent plus longtemps et à intégrer des personnages plus complexes à ses aventures . Pierre Laurendeau souligne toutefois que , déjà à cet âge , hors du contexte de jeu , l ’ enfant peut interpeler en lui des images , notamment pour le plaisir de rêvasser ou pour s ’ apaiser , et même utiliser d ’ autres éléments qui touchent sa sensibilité pour les éveiller en lui . « Il y a des études qui ont été faites sur les effets de la musicothérapie sur les enfants . Cela les aide à trouver en eux une zone où ils se sentent en confiance ou animés par quelque chose . Et cela est une disposition à être imaginatifs . »
24 psychologie www . montrealpourenfants . com