Montréal pour Enfants vol. 22 n°6 / Hiver 2022 | Page 30

AVANT QUE L ’ AVENIR NE SE CONSOMME …
La consommation au corpus ?
Les amis ne font cependant pas qu ’ inciter au conformisme , ils peuvent jouer aussi un rôle modérateur , en assurant leur soutien malgré quelques petites déviances ou contre l ’ impulsivité de l ’ un d ’ entre eux . Jihen Ben Arbia précise que le style parental , et plus particulièrement le style autoritaire , amène les enfants à imiter les autres plus qu ’ à s ’ y confronter . Cette chercheuse a également constaté que l ’ âge et la façon de recevoir de l ’ argent contribuent à faire évoluer l ’ inclinaison à céder aux appels publicitaires avec le temps : « Moi , j ’ étais très surprise de la maturité d ’ un adolescent de 16 ans , quand il disait : ‟ Lorsque j ’ étais jeune , je mettais beaucoup de pression sur mes parents pour obtenir la dernière version des Nike . Mais , maintenant , je commence à travailler ...”»
Comme une bonne part du problème relève du processus de socialisation , Sarah Benmoyal est fortement encline à penser que d ’ attaquer le problème des effets pervers du marketing directement à l ’ école , là où la pression sociale et le risque d ’ intimidation des jeunes sont plus forts , permettrait une action efficace . Les élèves n ’ en seraient alors pas à leur première campagne de sensibilisation ayant fait ses preuves pour transformer les comportements à long terme : « Parce que souvent , comme devant les vidéos YouTube , les enfants prennent pour argent comptant ce qu ’ ils voient , alors pourquoi ne pas l ’ introduire dans les manuels scolaires et dans les programmes d ’ école ? Ça fait déjà partie de la réalité quotidienne . On pourrait décrypter des vidéos YouTube ou le rôle des influenceurs , ou décrypter qui peut être payé par la marque . »
AVANT QUE L ’ AVENIR NE SE CONSOMME …
Les parents n ’ ont toutefois pas que des raisons de se décourager devant l ’ ingéniosité des géants de l ’ industrie pour s ’ adresser à leurs enfants . Les études tendent à démontrer que les enfants qui entendent parler du « bio-écolo-équitable », ou encore d ’ économie familiale , par leurs parents en gardent toujours des souvenirs , au fond de leur conscience , même lorsqu ’ à l ’ adolescence , ils font mine de n ’ écouter que leurs amis .
Les consommateurs de demain
Jihen Ben Arbia avance même que les adultes sélectionnent environ 75 % de leurs achats en fonction des observations de leur enfance : « On parle surtout des produits agroalimentaires , parce que c ’ est sûr que les marques de vêtements changent selon l ’ âge . On va voir des changements à l ’ adolescence , parce qu ’ il y a une structuration et une construction de la personnalité et de l ’ identité : on y trouve notre place . Mais à l ’ âge adulte , nous revenons à nos amours d ’ enfance , aux marques que l ’ on a aimées plus jeunes et que l ’ on a goûtées . »
À travers leurs habitudes de consommation , les parents privilégient les univers promotionnels qui auront le plus d ’ impact sur leurs enfants . Ils deviennent ainsi des complices plus ou moins conscients de ces divers univers concurrents qui tentent de mettre la main sur les consommateurs de demain . On ne parle donc plus , selon Sarah Benmoyal , de produits ou de publicité pour enfants , mais d ’ un processus plus complexe qui cherche à rattacher plusieurs générations : « Alors , si je prends l ’ exemple d ’ IKEA : vous avez en magasin ce système de labyrinthe . Et les enfants
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