Montréal pour Enfants vol. 19 n°4 La Rentrée 2019 | Page 38
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psychologie
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trop souvent à négliger les besoins également es-
sentiels de l’autre. Ce détournement d’attention
peut entraîner son lot de conséquences, puisqu’un
offenseur peut trouver sa zone de confort dans sa
façon d’agir ou changer de victimes, lorsque l’une
d’elles échappe à son contrôle. Hélène Larouche
assure cependant que de maintenir la communica-
tion ouvre la porte à une intervention parentale plus
efficace : « Même quand l’enfant essaie de tirer profit
des situations, il continue de nous faire confiance, en
tant que parent bienveillant. »
S’entraider pour intervenir
Annie Sayeur remarque que la partialité de l’amour
parental rend d’ailleurs souvent quasi impossible de
déterminer les torts de chacun, lorsque l’enfant re-
vient à la maison en larmes ou en colère. Le parent
gagne donc à aller s’enquérir d’un regard extérieur.
L’appel à l’intervention, plus spécifiquement du mi-
lieu éducatif, semble également crucial à cette éd-
ucatrice, à partir du moment où la situation semble
impliquer plusieurs enfants ou prendre des allures
d’intimidation : « … parce qu’il va être difficile de faire
cesser cela si on s’occupe seulement de la victime
ou seulement d’une ou deux personnes qui intim-
ident, parce qu’un autre va prendre le relais, puis un
autre, et cela n’aura plus de fin. »
La recherche de soutien extérieur peut se solder
par une écoute ou, au contraire, par une impression
de fermeture. Pour attirer l’attention, tout en évitant
une escalade d’accusations dont l’enfant à protéger
deviendrait la première victime, George Tarabulsy
suggère aux parents futés de passer, là aussi, par
l’interrogation : « L’action indirecte pourrait être, pour
le parent, d’aller à la cueillette d’informations auprès
de l’école : ‟Êtes-vous au courant que… ?”, ‟Savez-
vous que… ?”, ‟Pourriez-vous me donner plus de
détails à propos de… ? Mon enfant m’a dit telle ou
telle chose”. On sait que les éducateurs et les en-
seignants peuvent être très sensibles à ce genre de
questions, mais cela doit être présenté comme une
façon d’orienter l’action. »
Pour lui, le maintien de cette écoute passe aussi par
l’acceptation que, graduellement, l’enfant indiquera
son besoin d’aller chercher ailleurs ses réponses,
notamment si les problématiques apparaissent plus
près de l’adolescence : « Il y a aussi le fait qu’à un
certain âge, avec le développement de l’autonomie,
l’enfant va commencer à remettre en question la
capacité de son milieu de le protéger et d’agir en
son nom, pour son bien. Et l’enfant se retrouve
dans des contextes où l’adulte est moins en mesure
d’intervenir de façon efficace. »
Bien sûr, en cours de route, le milieu et même les
enfants auront maintes fois l’occasion de nous rap-
peler que l’art de se former aux interactions paci-
fiques demeure l’ouvrage de toute une vie. Mais
entre l’engagement des enfants dans les probléma-
tiques de la vie adulte et les épisodes où les « Ce
n’est pas moi, c’est lui ! » continuent de retentir
sur la banquette arrière, le chemin peut paraître
long. Lorsque la tension monte, les parents peu-
vent toutefois tenter de prendre du recul en se
projetant à l’époque où les drames enfantins, les
sourcils froncés les « Qu’est-ce que tu fais-là ? »
ne susciteront plus qu’un élan de nostalgie…
Merci à
Hélène Larouche, professeure au département
d’enseignement au préscolaire et au primaire de
l’Université de Sherbrooke
George M. Tarabulsy, directeur scientifique du Centre
de recherche universitaire sur les jeunes et les familles et
professeur de psychologie à l’Université Laval
Annie Sayeur, psychoéducatrice et auteure de la
collection Les Trucs d’Annie maisondeditionstlaurent.
com/product/1277891
Julie J. Brousseau, psychothérapeute et Fondatrice et
Directrice du Centre de thérapie pour couples et familles
de l’Outaouais www.ctcfo.com
Pour en savoir plus :
- Pour les enfants :
Sayeur, Annie. Valou fait mal aux amies, Amos, Maison
d’édition St-Laurent, 2018, 10 p.
Sayeur, Annie. Marinou se chicane, coll. Les Trucs
d’Annie, Amos, Maison d’édition St-Laurent, 2016, 9 p.
- Pour les parents :
Bourcier Sylvie. L’Agressivité chez l’enfant de 0 à 5
ans, coll. Parlons parents (réédition de 2008), Montréal,
Éditions du CHU Sainte-Justine, 2018, 248 p.
Tremblay et coll. Prévenir la violence par l’apprentissage
à la petite enfance, Montréal, Centre d’excellence pour
le développement des jeunes enfants (CEDJE), en ligne,
28 p.
- Pour les professionnels :
Coutu et coll. « Le développement des compétences
socioémotionelles chez l’enfant » p. 156-201 dans
Lemelin et coll. Développement social et émotionnel chez
l’enfant et l’adolescent, Les bases du développement,
Québec, Presses de l’Université du Québec, 2012.
Thériault, Chantal. Les conflits chez les enfants,
Programmes d’intervention pour favoriser l’acquisition
de l’autonomie,coll. Psychologie, Les éditions Québec-
Livres, 2017, 136 p.