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constant dans tous ces documents entre la
Vierge de Guadelupe, « mujer prodigio y sagrada
criolla » et un véritable orgueil national qui ressort
d'un fatras de subtilités et d'arguments qui
trouvent dans la Bible l'annonce de l'apparition
miraculeuse, ultime et divine justification de la
conquête de l'Amérique. Purement indienne à
ses débuts, la dévotion guadalupana est ainsi
devenue la chose des criollos mexicains.
POUR UNE HISTOIRE DE LA PRATIQUE
RELIGIEUSE AU Mexique (Extrait) 5
… « le guadalupanismo et l'art baroque sont les
uniques créations authentiques du passé
mexicain, étrangères à l'Espagne et au monde, le
miroir que fabriquèrent les hommes de la colonie
pour... se révéler à eux- mêmes ». Le culte de la
Vierge de Guadalupe se serait développé parmi
les criollos, les Blancs nés en Nouvelle- Espagne,
en même temps que la conscience de leur
originalité nationale, que leur
« patriotisme » mexicain.
Cette ferveur ne devait cesser de croître au cours
du xvie siècle, jusqu'au jour de septembre 1810
où le curé criollo Hidalgo entraînerait les foules
mexicaines à la révolte contre l'Espagne, derrière
l'étendard où figurait N. D. de Guadalupe,
symbole d'une nouvelle patrie et premier drapeau
national du Mexique.
Une critique sévère des documents du xvie siècle
permet à l'auteur d'établir que le succès rapide de
la dévotion guadalupuna parmi les Indiens, n'a
pas gagné à cette époque les a intellectuels »
européens ; les religieux, les Franciscains
surtout, — et les plus grands d'entr'eux, comme
Sahagun, en furent les adversaires déterminés1
: ils y voyaient une idolâtrie déguisée, et d'autant
plus dangereuse que les Indiens pouvaient
identifier la Vierge à la déesse indigène
Tonantzin, la « mère des dieux », dont un temple
s'élevait avant la conquête sur la même colline de
Tepeyac.
1. Sur l'opposition des Franciscains, voir R.
Ricard. La conquête spirituelle du Mexique,
(Paris, 1933), p. 228 et suiv., dont les conclusions
sont d'ailleurs plus nuancées que celle du Dr. de
La Maza.
ANNALES
Quand cette énorme documentation aura été
dépouillée méthodiquement, — seul un travail
d'équipe en viendra à bout, et il serait précieux
aussi pour l'histoire des fortunes et l'histoire
économique générale, — alors seulement on
pourra replacer les textes littéraires et
théologiques dans un milieu social concret et
apprécier leur véritable portée. L'auteur nous
donne l'exemple, qui cite deux testaments
indiens de 1573 et 1575, où des legs sont faits au
sanctuaire, et qui rappelle la générosité de D.
Alonso de Villaseca, peut-être l'homme le plus
riche de la Nouvelle-Espagne au xvie siècle,
offrant à l'église, en 1566, une «image d'argent »
de la Vierge, grandeur nature : Villaseca était
pourtant un Espagnol péninsulaire, non un criollo.
Il faut attendre le premier tiers du xve siècle pour
que s'affirme même chez les savants, les
théologiens, « le triomphe définitif du
guadalupanismo mexicain ». L'auteur étudie de
très près une littérature alors de plus en plus
abondante : les œuvres, parues après 1648, de
ceux qu'il appelle avec bonheur «les Quatre
Ëvangélistes de la Vierge de Guadalupe », tous
criollos, des poésies, de nombreux sermons
jusqu'ici inconnus et dont il souligne
excellemment la valeur représentative, et des
documents iconographiques. Nous ne pouvons
que renvoyer à son analyse dont le détail et
l'ingéniosité font tout le prix : mais le lien est
5
En https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-
2649_1956_num_11_3_2561. Consultado el 15 de
27
mayo de 2019.